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  [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas
Christopher Hart
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MessageSujet: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptySam 24 Fév - 14:33

 [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas Eglise10

Le week-end était pluvieux, à tomber des chats et des chiens, comme on disait dans son Angleterre natale. En matière de climat, Christopher n’avait pas été dépaysé en venant à Europolis.

Vêtu d’un jean simple et d’un épais manteau bleu, il s’était rendu à l’église protestante de son quartier, tôt le matin pour y trouver le calme auquel il aspirait après une semaine éprouvante.

L’édifice intégré au paysage urbain n’évoquait en rien la magnificence des cathédrales d’antan. Dépourvu de clocher, l’extérieur se comparerait à un bâtiment ordinaire sans la croix de métal qui trônait discrètement à son sommet, évoquant une antenne radio à la forme singulière. Les religions étaient minutieusement contrôlées et surveillées en Europe, la banalité de la construction quasi profane n’avait donc rien de surprenant.

Néanmoins, une vague d’amère nostalgie frappait systématiquement le trentenaire lorsqu’il franchissait le parvis d’une église. Ce lieu sacré représentait pour lui le jardin secret d’une enfance heureuse, la mémoire d’une époque révolue à chanter et jouer de la musique pour le Seigneur. Une décision de sa mère bienaimée, que le petit Anglais bien discipliné n’avait jamais contestée malgré son absence de foi. C’était une période d’innocence joyeuse à laquelle beaucoup d’enfants, nés au cœur des zones de guerre ou des quartiers défavorisés, n’avaient jamais eu droit. Christopher chérissait ces souvenirs privilégiés dont il était aujourd’hui le dernier légataire familial.

Comme le riverain l’espérait, les travées étaient vides et il avança dans l’allée centrale, remarquant alors une présence à l’extrémité de la rangée du fond. On ne pouvait guère l’apercevoir depuis le renfoncement de l’entrée, et un œil non exercé aurait facilement pu la manquer. La silhouette était menue, vêtue d’habits ordinaires et immobile. De toute évidence, cette personne discrète cherchait la tranquillité.
Beaucoup de visiteurs venaient avec les mêmes aspirations, dont une partie significative de non-croyants. En effet, le calme et la sérénité des lieux contrastaient avec l’activité bruyante de la ville, favorisant la réflexion et le recueillement.
Certains venaient réfléchir à leur choix de carrière, d’autres à leurs amours. Les plus pauvres venaient simplement profiter d’un abri ; les plus audacieux se questionnaient sur d’importantes questions existentielles.

Chris comprenait et respectait les motivations de tous, et son regard ne se serait jamais attardé sur la visiteuse isolée sans la position inhabituelle qu’elle avait adoptée. Tête inclinée, mains collées sur les tempes, on pouvait avoir l’impression qu’elle cogitait sur un sujet important. Mais toute la partie supérieure de son corps frémissait comme sous l’effet d’une douleur contenue. En outre, les murs de l’église réverbéraient le bruit d’une respiration saccadée, proche du gémissement.
Le policier côtoyait assez la souffrance pour la reconnaître. Néanmoins, il ne pouvait déterminer si la cause de sa douleur était de nature physique ou psychologique. Une femme souffrant de la perte d’un proche pourrait contenir sa peine de la même façon, avant de lâcher prise et déverser un flot de larmes libératrices.
Quelles que soient les raisons réelles de son affliction, Chris ressentait l’obligation de proposer son aide à cette personne en proie au tourment. Une obligation qui ne devait rien à son engagement de policier, mais à la compassion d’un être humain envers un autre.

Il s’approcha de l’inconnue, s’arrêtant à la limite de sa zone de confort pour ne pas susciter une réaction instinctive de défense.

— Mademoiselle ? Madame ? Puis-je vous aider ?

La voix était claire et douce, parfaitement maîtrisée. Officier habitué à donner des ordres et interroger des durs à cuire, mais aussi enfant de chœur durant plusieurs années, Christopher était capable de moduler sa voix en ton aussi bien qu’en timbre. Son langage était pareillement varié, mais dix ans à Europolis n’avaient guère suffi à corriger son accent anglais. Mais peu y prêtaient attention dans l’immense capitale multiculturelle.
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Sasha Pachkov
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMar 27 Fév - 11:41


Pourquoi je suis entrée là déjà ? J’ai beau essayer de trouver une raison sensée, un truc qui serait logique, en vrai, y a rien qui vient. Parce que j’ai été guidée par mon instinct, l’habitude ou une connerie dans le même genre. Je me rappelle, quand j’étais toute petite. Erica s’asseyait à côté de moi tous les soirs et me demandait de joindre les paumes de mes mains. Et de fermer les yeux pour remercier Dieu d’être en vie, pour le remercier de la chance que j’avais et tout un tas de trucs que j’ai fini par oublier avec le temps. Je me suis souvent demandé à quel point tout ça était vrai. Erica y croyait dur comme fer en tout cas, malgré ce qu’elle pouvait voir au quotidien au centre. Ou à cause de ça peut-être, je saurais pas trop dire en vérité. Je lui ai jamais posé la question. Et je me suis rendue compte qu’il y avait un tas de questions dont j’aurais aimé connaitre les réponses la concernant. Je soupire à cette idée, alors que je regarde mes mains, la mine sceptique. Est-ce que ça compte encore si je le fais ? Est-ce que le Dieu d’Erica m’écoutera si je lui demande des trucs ? Elle me disait qu’il fallait pas réclamer, juste le remercier pour tout le bien qu’il apportait sur cette terre. Bah mon vieux, quand je vois l’état de notre terre, j’ai du mal à pas être sceptique quand même.

Et si la petite fille que j’ai été y croyait, plus ou moins, l’adulte elle, ne sait pas trop quoi penser. Pourtant, il m’arrive de venir ici, quand j’ai besoin de calme, quand la douleur dans ma tête cogne tellement fort, que les médicaments ne font plus aucun effet et que j’ai l’impression que je vais devenir complètement dingue si ça continue. Il y a dans cette église une espèce de calme, de sérénité, qui me rappelle Erica quand elle me berçait, quand les crises étaient trop fortes. Je sais pas trop si Dieu est dans le coin ou pas mais, pour le moment, je me sens juste terriblement seule en réalité. Et, comme à chaque fois que je suis dans cet état, je finis repliée sur moi-même, presque recroquevillée, les mains appuyées sur les tempes en espérant que ça finira par s’arrêter. Parce que ça s’arrête toujours. Ça met du temps parfois, beaucoup de temps même, mais je finis par y voir clair de nouveau, par pouvoir respirer correctement et par me dire que ça va mieux. Bon, autant dire que là, c’est pas pour tout de suite, c’est même carrément pas gagné en vérité. J’essaie de garder mon calme, oubliant presque qu’au final, Dieu a l’air d’être aux abonnés absents pour le coup.

Je finis par entendre une voix qui transperce le nuage cotonneux qui commence à m’entourer doucement mais surement, alors que mes pensées partent dans tous les sens et que je suis incapable de me concentrer sur quoi que ce soit. Je tourne la tête et je plisse les yeux, essayant sans grand succès de faire une mise au point sur le type qui est en train de me parler. Je crois que je l’ai déjà vu. Bon, en vrai, je suis pas sûre. Et il y a un truc presque apaisant dans sa voix. Je me dis que je dois quand même avoir vaguement l’air d’un poisson mort à le fixer comme ça, sans répondre, avant de battre des cils et d’inspirer doucement. « Je sais pas… je… en vrai j’sais pas ce que je fais là. » Oh, j’ai réussi à aligner plus de deux mots d’un coup. Impressionnant non ? Bon, je suis supposée dire un truc intelligent qui me donne pas l’air d’une junkie en manque incapable d’être sociable, sauf qu’à bien y réfléchir, c’est exactement ce que je suis là, tout de suite. Et ça craint à mort. Alors du coup, je murmure, sans même me demande s’il va m’entendre ou pas. «… j’ai tellement mal à la tête… » Pire qu’un mauvais appel à l’aide non ? Je me rends pas compte.
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Christopher Hart
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMer 28 Fév - 17:53


L’inconnue illustrait à merveille la définition du mot « paumée ». Si le tableau ne suffisait pas, ses premières paroles d’une clarté comparable aux boues d’évacuation d’un élevage porcin levaient toute ambiguïté possible. Néanmoins, pour côtoyer les drogués au quotidien et suivre les formations régulières de la police sur les derniers stupéfiants en vogue, Christopher savait reconnaître les signes et effets secondaires de ces substances addictives. La jeune femme assise sur le banc n’était pas en proie à un enfièvrement ou des tremblements intempestifs, ses yeux ne brillaient pas de la lueur folle ou mystique des passagers vers le septième ciel (comparé à la prière, le voyage était beaucoup plus rapide et efficace avec la dope). Non, le policier aurait juré que cette femme ne se droguait pas, ou pas assez pour en manifester les symptômes.

Ses paroles suivantes, à peine audibles, confirmèrent la douleur qui l’affligeait. Grâce de Dieu ou jour de chance, le seul paroissien présent dans l’église avait de quoi soulager son mal.
Il sortit un pilulier blanc de sa poche, étiqueté de chiffres et de noms incompréhensibles au commun des mortels. Chris y préleva une pilule rouge, qu’il présenta à l’inconnue sur une paume grande ouverte.

— Tenez, avalez ceci, c’est un antalgique léger, je les utilise pour mes douleurs.

Conscient que son geste pouvait éveiller la suspicion (les tristement célèbres drogues du violeur continuaient leur œuvre sordide), il agita sa petite boîte frappée du logo d’une grande société pharmaceutique. La qualité de ces médicaments haut de gamme dépassait nettement celle des produits génériques souvent d’origine douteuse. Le prix aussi, mais Christopher n’avait pas à s’en soucier. La police avait ses tares, mais elle remboursait généreusement les frais médicaux de ses agents.
Il écarta de nouveau les lèvres dans un sourire qui se voulait rassurant.

— N’ayez crainte, ces médicaments sont sûrs. Cela ne guérira pas votre… problème quel qu’il soit, mais vous vous sentirez mieux dans quelques minutes.

Il rangea ensuite le pilulier dans sa poche, sans prendre le risque de lui confier la boîte magique. Erreur d’un esprit troublé ou opportunité d’en finir avec la vie, elle pourrait avaler tout le contenu d’une traite.
Après un regard vers le fond de l’église, Christopher contrôla l’état de sa patiente d’un regard observateur, puis l’informa de sa démarche.

— Je reviens avec de l’eau. Essayez de vous détendre.

Des gestes et des paroles répétées au cours de centaines d’interventions, le plus souvent au domicile de familles déchirées par la violence. La voix restait douce, mais elle portait le timbre de l’autorité.

Christopher quitta la rangée de bancs d’un pas leste, gagnant rapidement l’allée centrale. Après quelques enjambées en direction de l’autel, il s’arrêta net comme quelqu’un se rappelant soudain un détail important. Le policier en civil se retourna vers l’inconnue et s’adressa à elle d’une voix forte et claire.

— Au fait, je m’appelle Christopher. Je fais partie de cette paroisse.

Un sourire poli, et il avala les derniers mètres menant à la sacristie. La zone était réservée au personnel, mais dans la maison du Seigneur certaines règles prévalaient sur les autres, en particulier celle d’assister son prochain. Du moins, c’est la raison que Christopher invoquerait si on lui formulait un reproche.

Il récupéra un élégant calice en bronze qui servait aux liturgies et le rinça sous le distributeur d’eau bénite.
Le progrès technologique et écologique avait investi l’Église. On ne bénissait plus l’eau, mais le produit d’un gros purificateur relié au réseau d’eau potable, fonctionnant sur le principe de l’osmose inverse. L’eau qui en sortait était de qualité médicale, proche de l’eau distillée. L’extérieur de la machine était habillé d’ornements religieux ; une prière extraite de la Bible donnait la bénédicité juste au-dessus du robinet : « Ô Seigneur, qui, pour le bien-être de l'homme, avez établi les mystères les plus merveilleux dans la substance de l'eau, écoutez notre prière et répandez votre bénédiction sur cet élément qui est préparé avec divers rites de purification. Que cette créature qui est vôtre, qui est utilisée dans vos mystères et dotée de votre grâce, serve à chasser les démons et à bannir la maladie. Que tout ce que cette eau arrose dans les maisons et les rassemblements de fidèles soit délivré de tout ce qui est impur et nuisible, ne laisse aucun souffle de contagion planer, aucun soupçon de corruption, laisse toutes les ruses de l'ennemi tapi n'aboutir à rien. Par l'aspersion de cette eau, que tout ce qui s'oppose à la sécurité et à la paix des occupants de ces maisons soit banni, de sorte qu'en appelant votre saint nom, ils puissent connaître le bien-être qu'ils désirent et être protégés contre tous les périls, par le Christ notre Seigneur. Amen. »

Une fois le récipient sacré généreusement rempli, il rebroussa chemin avec un sourire satisfait aux lèvres. L’opération n’avait pris que deux minutes. La jeune femme était toujours là, et c’est avec un sourire mi-amusé mi-triomphant qu’il lui tendit le calice.

— Ce n’est pas le Saint Graal, mais vous trouverez peu d’eau aussi pure à Europolis.

Christopher patienta un instant, puis adopta une expression plus sérieuse.

— Je ne suis pas prêtre, ni même un bon chrétien, mais si je puis vous aider en quoi que ce soit vous me permettrez peut-être de réaliser ma bonne action du jour.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMer 7 Mar - 10:42


Y a des jours où on ferait mieux de rester coucher, je vous le confirme. J’ai l’impression d’avoir la tête qui s’éparpille en plein de petits morceaux et d’être totalement incapable de les recoller, de pas savoir par où commencer. Le pire ? C’est que c’est pas la première fois que ça m’arrive. Et comme dans un mauvais réflexe, comme un ex-alcoolo qui irait chercher du réconfort dans un bar, je suis entrée ici. Alors que bon, si Dieu existait, s’il m’entendait, ça voudrait dire qu’il se fout totalement ce qui peut m’arriver. J’arrive pas à piger pourquoi Erica le priait avec autant de ferveur.

En tout cas, j’ai vraiment du mal à faire le point et je dois me concentrer pour comprendre ce que dit le type. Je louche sur la gélule qu’il me tend, arquant un sourcil sceptique en mode « on me la fait pas à moi » mais on dirait qu’il a anticipé le truc et il me montre la boite, que je fixe, non sans esquisser un sourire que j’essaie de rendre narquois. Même si je dois plus avoir l’air de grimacer qu’autre chose en vrai. Mais mon amour-propre, s’il existe encore, préfère la première option. « Vous savez, si vous voulez me filer des saloperies, c’est pas en me montrant l’paquet que j’aurais plus confiance hein... » Je m’impressionne moi-même à réussir à faire une phrase en entier. Mais j’attrape quand même la pilule et je la fixe, la mine sceptique. Mais, de toute façon, foutue pour foutue, autant qu’au moins, ça soulage un peu la douleur non ?

Je laisse quand même filer, en toussant un rire, alors qu’il essaie de se faire rassurant. « Y a rien qui guérira mon problème mais c’est gentil d’vous en soucier. » Et ouais, je suis même polie quand je veux. Pourtant, dans cet état, je suis généralement pas de super bonne humeur. Je soupire doucement, même si je m’adosse contre le dossier, apaisée sans même m’en rendre compte par le ton de sa voix. Je souffle, alors qu’il s’éloigne, sans bien savoir s’il m’entend ou pas. « … enchantée Christopher... » Et je ferme les yeux quelques instants, inspirant longuement avant d’ouvrir un œil quand il revient, un calice entre les mains. Et j’ai un sourire avant de secouer la tête. « Sérieusement ? Vous risquez pas une punition divine si vous piquez ce genre de … trucs ? Et moi si je bois dedans ? » Bon, en vrai, je me fais pas prier et je l’attrape à deux mains, gobant la pilule avec un soupir de soulagement. On repassera pour la méfiance, la parano ou ce genre de trucs. Je suis pas en état de toute façon. Je reste silencieuse quelques instants, avant de souffler, à mi-voix. « … Sasha. Je m’appelle Sasha. Et comment on fait pour être membre d’une paroisse sans être bon chrétien ? » Bon, déjà, ma propre voix a arrêté de résonner dans ma tête au point de me donner envie de l’arracher, c’est un progrès notable je pense. Quant au fait qu’il puisse m’aider… en vrai, j’en ai pas la moindre idée. Est-ce que j’en ai besoin ? Et, surtout, est-ce que j’en ai envie ? En soit, qu’il fasse sa bonne action du jour, je m’en cogne complètement. Mais s’il peut vraiment m’aider. J’en sais trop rien en fait. On va peut-être attendre d’avoir moins mal avant de se décider non ? « … il fait rapidement effet votre truc ? » Ouais, voilà, se focaliser là-dessus pour commencer, ça me parait bien.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyJeu 8 Mar - 18:02

La jeune femme s’était montrée réticente avant d’accepter le médicament, une réaction qui confortait Christopher dans son jugement. Une personne véritablement accro (à la drogue ou aux médocs) aurait de suite gobé la pilule en suppliant une nouvelle tournée. L’attitude polie dont l’inconnue faisait preuve jouait aussi en sa faveur : on ne pouvait forcer quelqu’un à recevoir de l’aide, en dehors des situations critiques où son étincelle de vie menaçait de s’éteindre.

Après le passage du policier à l’abreuvoir d’eau bénite, la souffrante semblait légèrement plus apaisée. Son sourire et sa remarque sur l’insolite récipient étirèrent davantage les lèvres du trentenaire. Il goûtait l’humour comme un œnophile savourait le bon vin, même quand la boutade était involontaire.

— Si Dieu existe, s’il considère que ce calice est sa propriété et s’il est assez con pour vouloir punir quelqu’un qui l’utilise pour soulager une autre personne, alors j’en assumerai seul les conséquences. Vous n’avez donc rien à craindre. Et entre nous, avec des « si » aussi absurdes, je crois que je n’ai rien à craindre non plus.

Il porta ensuite une main à un coin sa bouche, dans l’attitude du complice qui avoue un secret à mi-voix.

— Par contre, je vous saurais gré de ne rien répéter de tout ceci au pasteur.

Après un clin d’œil entendu, Christopher bascula d’un geste souple sur la travée précédant celle de Sasha. Inconsciemment ou non, les gens (surtout les femmes seules en présence d’un homme) se sentaient plus rassurés quand l’accès à la sortie était dégagé. S’assoir ou même rester debout à côté d’elle pourrait être ressenti comme une menace, une forme d’oppression. Après tout, le policier ignorait toujours la raison de sa présence et de son affliction. Si l’hypothèse d’une agression semblait peu probable chez cette personne qui tolérait très bien sa présence, elle n’avait pas l’air du genre à chercher qu’on la console dans ses bras.

Le policier en tenue du dimanche s’installa donc en face de Sasha, dont la question suivante démontrait l’ignorance en matière de religion. Il y répondit avec le même sourire amusé, une touche de désinvolture en sus.

— Oh, pour être membre d’une paroisse, du moins une paroisse protestante comme celle-ci, c’est très simple. Vraiment. Il faut soit être baptisé, soit reconnaître devant le pasteur que « Jésus-Christ est le Seigneur ». J’appartiens à la première catégorie, ajouta-t-il pour lever toute ambiguïté.

Sasha éluda ensuite la proposition d’aider. Déjà mieux qu’un rejet.
Le « coup de la bonne action » était une approche plutôt efficace, que le paroissien jugeait pertinente dans le contexte où ils se trouvaient. Il n’existait aucune formule magique pour aborder les gens et les inciter à parler. Dans l’école de police qu’avait suivi Christopher, on apprenait aux officiers diverses méthodes éculées, mais aussi et surtout à suivre son instinct. S’adapter à la situation, à la personne, au contexte, aux impondérables. Plus facile à dire qu’à faire, mais un point essentiel était d’éveiller un sentiment de réciprocité. Quand on proposait simplement son aide, la personne s’attendait à une entourloupe du genre « trop généreux pour être honnête, il va me demander quelque chose en échange et je ne sais pas quoi, alors je l’envoie bouler ». Quand on présentait la chose sous la forme d’un échange de services, l’altruisme suspect laissait place à un deal rassurant où chacun avait une part du contrat à respecter. En outre, une personne en état de faiblesse se sentait valorisée, ravie de pouvoir agir et se sentir utile.
Voilà pour la théorie qui se vérifiait dans les statistiques, mais qui en pratique ne produisait pas toujours le résultat escompté.

Ni gagnant, ni vaincu, Christopher temporisa et répondit à la question de Sasha sur le médicament. Après quinze ans dans la police, il possédait des connaissances en pharmacopée supérieures au citoyen lambda. Et heureusement pour lui, il connaissait parfaitement les effets de son traitement.

— À jeun, oui, c’est une question de minutes. Une fois que la pilule atteint l’intestin, elle se dissout et libère ses composés actifs qui passent ensuite dans le système sanguin. À partir de là, l’effet est quasi immédiat. Si vous n’avez pas mangé avant de venir ici, vous devriez déjà ressentir un soulagement. Comme le dosage n’est pas important, la douleur ne disparaitra pas totalement, avec pour avantage de conserver un esprit clair.

Christopher laissa le temps à Sasha de digérer ces informations. « Esprit clair » était sans doute une image exagérée pour décrire une personne dans son état. Un état qu’il devait comprendre avant de pouvoir agir, ou même simplement d’exprimer quelques mots réconfortants. Comme disait autrefois sa mère : une bonne parole ne coûte rien et ça rapporte beaucoup, il n’y a pas meilleur investissement. Dans son travail, le policier distribuait plus de coups et de remontrances que de bonnes paroles, mais seules ces dernières réchauffaient la poitrine de manière agréable.

— Vous avez dit que rien ne pourrait guérir votre problème, souffrez-vous d’une maladie grave ? Suivez-vous un traitement médical, ne serait-ce que pour atténuer les symptômes ou soulager la douleur ?
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMar 13 Mar - 10:59


Bon, qu’il pense pas non plus qu’en étant sympa, il pourra m’entuber plus facilement. J’ai l’habitude des mecs qui sont persuadés que s’ils te traitent de façon à peu près décente, ils ont droit à ce qu’ils veulent après. Et j’ai toujours réussi à m’en défaire sans avoir à me faire passer dessus, c’est pas aujourd’hui que ça va commencer. Encore moins pour une simple gélule. J’ai pas beaucoup de fierté mais quand même, j’en suis pas encore à ce point-là. Et je louche sur le calice alors qu’il prend la parole, soufflant, d’un ton pensif. « Z’êtes pas supposé me dire que Dieu existe de base ? Qu’on est dans sa maison, qu’il veille sur nous… les conneries habituelles quoi. »

Mais j’ai quand même un rire au reste de ses propos. « Je suis pas sûre qu’il me croirait de toute façon, même si j’ai pas trop une tête de vandale. Moins que vous en tout cas. » J’arrive presque à me faire malicieuse. Presque, faut pas trop déconner non plus. Parce que ça continue de pulser dans ma tête, au même rythme qui ne cesse de se répéter encore et encore. Comme si ça allait jamais s’arrêter. L’eau me fait du bien, plus que ce que j’aurais cru en vrai. A croire qu’elle est vraiment aussi pure qu’elle le dit. Le truc auquel on a pas le droit dans notre quartier de miséreux. Je le suis des yeux alors qu’il change de travée, sentant mes épaules se détendre sans même que je comprenne vraiment pourquoi au premier abord. Ah si, il me montre que je peux me tirer si je veux. C’est… cool. Je suppose. « Vous êtes pas du genre à reconnaitre ça devant le pasteur ? Mais… c’est pas un peu incompatible de pas le reconnaitre et d’être baptisé ? Ou contradictoire, c’est comme voulez…» C’est bizarre quoi. Enfin, j’ai jamais été baptisée. Je crois. Tiens, encore un truc que j’ignore sur moi. Je vais pouvoir le rajouter à la liste des questions dont j’aurais jamais la réponse. C’est parfait.

Je retiens un soupir, me focalisant plutôt sur le fait qu’il répond pas vraiment à mes questions. Mais au moins, ça détourne mon attention du problème principal. Enfin, celui du moment quoi. « Manger ? Ah euh… j’ai mangé quand moi… Je crois que j’étais sortie pour ça de base. Je sais plus trop en vrai. Je dois être à jeun donc. » Je fronce les sourcils tout en parlant, essayant de me rappeler où j’ai pu trainer avant de débarquer ici. Sauf que c’est un peu le flou artistique, on va pas se mentir. J’ai un sourire un peu désabusé avant de souffler, autant pour moi-même que pour lui. « La douleur ne disparait jamais vraiment. On s’y habitue. Comme à tout le reste. » Et je relève la tête dans sa direction avant de hausser les épaules. « Un traitement médical ? Ca coûte du fric Christopher. Et on a pas tous les moyens de se permettre ce genre de… fantaisies. » Surtout quand on a des faux papiers dont la qualité peut laisser à désirer. « Donc je dirais que non, y a rien qui puisse guérir mon problème. Vous croyez que si je prie très fort, Il écoutera ? » Le pire ? C’est que je pose vraiment la question, je ne suis pas simplement ironique. Si on demande un truc et qu’on y croit, ça peut se réaliser ?
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMar 13 Mar - 17:52

Quel que fût le rapport de Sasha à la religion, elle avait l’air d’y prêter le même crédit qu’aux horoscopes des magazines féminins. Ou aux prédictions météo à sept jours. Dans les deux cas : un ramassis de foutaises dérivé de concepts scientifiques authentiques. Par conséquent, il semblait toujours y avoir une once de vérité (parfois microscopique) à la base de ces interprétations abracadabrantes.

— Eh bien, je suis censé dire la vérité avant tout, non ? Pas la vérité absolue, suprême, qu’aucune personne honnête ne prétendrait jamais détenir. Mais celle à laquelle je crois. Les chrétiens rigoristes vous diront que la vérité est inscrite noir sur blanc dans les évangiles et tout le tralala, mais tous interprètent à leur sauce ces textes métaphoriques. En tout cas, si cette histoire d’église-maison-du-seigneur-tout-puissant est vraie, cela veut dire que Dieu a vécu comme sans abri pendant bougrement longtemps avant de devenir le plus gros propriétaire immobilier de l’histoire. En somme, la représentation parfaite de l’American Dream du siècle dernier. Je crois que l’humanité a passé l’âge de croire à ces contes de fées.

La jeune femme poursuit sur un nouveau trait d’humour, comparant la tête du policier à celle d’un vandale. L’image fit rire l’homme aux multiples facettes, qui surenchérit à la plaisanterie.

— Et encore, vous ne m’avez pas vu au retour d’une soirée !

Avant de revêtir le masque de Stubborn, Christopher en avait déjà fini avec les soirées piste de danse et alcool à volonté. Les mois puis les années passées avec Lauren l’avaient préparé à endosser le rôle de bon père de famille, qu’il assumerait sans doute aujourd’hui si sa compagne n’avait pas été une tartufe doublée d’une morte.
Les soirées auxquelles il faisait allusion le transformaient en chien de combat qui rentrait chez lui couvert de lésions et d’ecchymoses. Parfois la gueule ravagée et les paupières gonflées de sang noir, quand Stubborn n’avait pas su protéger suffisamment son visage. À ces moments-là, nul doute que le barbu musclé ressemblait à un Vandale, ce pillard du Moyen-Âge qui prenait et défendait son butin à coups de hache.
Bien entendu, Christopher n’avait jamais mentionné sa double vie dans l’enceinte d’une église, maison de Dieu ou pas. Ce secret, Vyper semblait la seule à le connaître et le policier n’avait jamais rencontré la justicière criminelle en chair et en os(croyait-il).

Alors que Sasha paraissait tirer un certain soulagement de la bonne eau (super purifiée) bénite, elle souleva l’apparente contradiction entre le baptême et la foi.

— Vous savez, lors du baptême j’étais encore un bébé qui ouvrait uniquement la bouche pour brailler et pour téter, toujours dans cet ordre. Je n’avais donc pas le choix, et ce sacrement fait de moi un chrétien ad vitam æternam. De toute façon, même si j’avais été doué de parole et de raison à cette période, j’aurais été incapable de dire non à ma mère. Et pas seulement car je la voyais comme mon garde-manger personnel.

Christopher rit à nouveau, heureux d’évoquer le souvenir de sa mère à l’époque où les Hart formaient une famille heureuse. Linda Hart et Lauren Anders avaient été les deux femmes de sa vie. Les deux étaient mortes, mais seule la première n’avait jamais trahi sa confiance et son amour. L’enfant unique était conscient du privilège qu’il avait eu, à une époque où les relations humaines devenaient toujours plus instables et superficielles. Christopher était resté aux côtés de sa mère jusqu’à ce que le cancer finisse de la ronger, et il n’avait jamais regretté ces années qu’il aurait pu employer à festoyer, chasser la donzelle ou faire progresser sa carrière. Ce qu’il regrettait, en revanche, c’était l’incompréhension et les moqueries qu’avait suscité son geste, comme si prendre soin de ses proches était au mieux une perte de temps, au pire un comportement infantile.

Cet égoïsme au niveau individuel se reflétait dans le manque criant de solidarité. La jungle du chacun pour soi. Les observations de Sasha sur la cherté des traitements médicaux en étaient l’illustration, une parmi tant d’autres. Europolis avait un temps représenté l’espoir d’un monde plus juste et égalitaire ; le projet était retombé comme un soufflet. Pire, le gâteau sentait carrément le cramé, et il ne restait plus grand-chose à sauver.

— Tenez, gardez-la, dit le paroissien en tirant sa boîte d’antalgiques de sa poche (qui devait encore contenir vingt ou trente pilules). Je sais bien que ça ne vous guérira pas, mais ces médicaments soulageront un peu les crises particulièrement douloureuses. Promettez-moi juste une chose : jamais plus d’une pilule à la fois.

Christopher avait agi spontanément, sans se demander si la malade allait profiter de la main tendue pour lui soutirer d’autres boîtes à l’avenir. Auquel cas il l’enverrait balader, poliment d’abord, plus rudement si elle insistait. Le policier n’avait jamais versé dans le trafic de quoi que ce soit et ne changerait guère sa ligne de conduite pour une inconnue. En quinze ans de métier, il avait clairement défini la limite entre un acte bienveillant et la tentative irréaliste de pallier les tares du système.

— Ne vous inquiétez pas pour moi, j’ai la chance d’avoir une bonne assurance maladie. Et si votre estomac, à défaut de votre mémoire, vous rappelle qu’il est l’heure de passer à table, permettez que je vous offre un bon repas. D’ailleurs, certains paroissiens avanceraient l’idée que notre rencontre apporte un élément de réponse à votre question. Je ne crois pas au Dieu dépeint dans la Bible, mais peut-être qu’il y a des forces dans l’univers qui nous dépassent, peut-être qu’une partie de nous survit après la mort, et que les personnes qui nous ont aimés restent à notre écoute, pouvant même nous apporter une aide quelconque. Peut-être qu’une prière adressée à Dieu, à un parent décédé ou à un héros de comics revient au même, qu’il s’agit simplement d’une balise envoyée dans les tréfonds mystérieux de l’univers. Et si cette balise est suffisamment lumineuse, autrement dit pure et intense, quelqu’un ou quelque chose pourra s’en saisir et nous apporter du réconfort en retour. Pas forcément en exauçant nos prières, mais à travers un sentiment agréable, une idée de génie ou un événement positif. Quelque chose qui nous aide à avancer, ou du moins à supporter l’insoutenable. Et puis, des guérisons miraculeuses se produisent parfois, dans des lieux sacrés comme Lourdes mais aussi dans l’intimité d’une chambre d’hôpital. Effet placebo ou action de forces extérieures, le débat restera ouvert tant qu’on ne saura pas comment cela fonctionne.

Cinq siècles plus tôt, Christopher aurait fini au bûcher pour ces paroles blasphématoires. Ou plus probablement, il aurait fermé sa bouche pour que son nom ne figure pas dans les parchemins de l’Inquisition, rayon « Hérétiques » des plus sombres étagères de l’Église. En 2050, on pouvait à la fois ne croire en rien et s’interroger à visage découvert, en risquant au pire les railleries (parfois vives, mais rarement fatales) des matérialistes pour qui la réalité se limitait à l’univers physique.
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Sasha Pachkov
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMer 21 Mar - 11:27


Je me frotte les yeux dans un geste machinal, espérant vaguement arriver à faire une mise au point qui me fait défaut depuis quelques heures déjà. Au moins ce type-là, Christopher, a le mérite de me distraire suffisamment pour que j’arrête d’avoir envie de m’arracher les yeux pour avoir moins mal. Si, si je vous jure que c’est exactement ce que je finis par ressentir. Et qu’on vienne pas me parler de douleur psyhosomatruc parce que là, je vais vraiment m’énerver. Ou que je suis juste en manque de médoc. Je dis pas que ça a pas un impact sur ma vie mais, quand même, je sais ce que c’est d’avoir mal ou de l’imaginer. En tout cas, ce qu’il me dit capte carrément mon intérêt et je penche la tête sur le côté, curieuse, alors qu’il reprend la parole. Avant de laisser filer un rire. « … je sais pas trop en fait. Les gens portés sur la religion ont pas vraiment l’air de se soucier de ce qui est vrai ou pas en fait. Comme vous dites, les chrétiens disent que la vérité est écrite dans vos bouquins mais… vous êtes en train de me dire que Dieu était juste un SDF qui a trouvé un ticket de loto ? En gros ? Et personne a pensé à vous cramer pour avoir ce genre de pensées ? Parce que ça se fait pas trop non ? Mais j’aime bien… ce genre de conte de fées. Ça pourrait presque donner l’impression qu’on peut s’en sortir au final, si on est pas né du bon côté. » Je me suis faite songeuse même s’il me faut pas longtemps pour balancer une petite vanne.

Et j’aime bien qu’il en rajoute une couche en fait. Ça me détend, plus que ce que je l’aurais cru et j’inspire longuement avant de le fixer, le regard plus amusé et probablement moins vitreux qu’à mon arrivée. « Hum… j’ai du mal à me décider sur le fait que vous soyez un travelo qui chante des vieux tubes dans un bar ou si vous êtes du genre à mettre un masque pour aller tabasser des méchants. Vous préférez quelle option ? » Aucune des deux n’est vraiment crédible vu sa tête, mais c’est marrant à imaginer. Je l’écoute me parler alors de son baptême, avant de froncer légèrement les sourcils et de me faire pensive. « … alors, si on est pas baptisé dans les règles, on est pas vraiment croyant ? Ça marche comme ça ou la vraie foi n’a pas besoin de ce genre de choses, blablabla… ? Et vous pouvez pas changer de Dieu si celui-là vous gonfle ou si vous êtes pas d’accord ? » Je me rends compte qu’à part les prières d’Erica, j’y connais vraiment que dalle en fait. Mais bon, vu que Dieu a jamais eu l’air de se soucier vraiment de moi, pourquoi est-ce que je l’aurais fait ? J’ai déjà bien assez à gérer comme ça sans avoir à me dire qu’il y a un type qui juge ce que je fais au-dessus de ma tête. Je suppose.

En tout cas, il a l’air plutôt sympa. Bon, après, je sais qu’il peut tout à fait cacher son jeu et être le pire des pervers. Ce serait pas le premier ni le dernier. Mais pour le moment, je gère, même si je fixe la boite avec scepticisme. « … c’est quoi l’arnaque ? Vous voulez un truc en échange ou quoi ? Parce que les gens sympas gratuitement, comme ça, c’est… inhabituel. » Pourtant, je la glisse dans ma poche avec un hochement de tête à ses recommandations. J’ai pas spécialement envie de me foutre en l’air, donc ça devrait aller. Je me mordille la lèvre inférieure quand il reprend, l’écoutant avec de grands yeux avant de lâcher, pensive. « Je veux pas de… enfin j’ai pas besoin qu’on me fasse la charité hein. J’ai un boulot et je paie mes factures, mon loyer et ma bouffe. Je suis pas tant à la rue que ça quoi. Mais manger avec vous ouais, pourquoi pas.» Je préfère mettre les choses au clair de suite, avant qu’il s’imagine qu’il peut me mettre dans son lit avec un burger et des médocs. Je sais, j’ai du mal à me défaire de cette paranoïa latente mais difficile de faire autrement non ? Et je plisse les yeux, essayant d’assimiler le reste de ses propos. « Vous êtes bizarre. » Oui, je sais, c’est pas hyper prolixe mais, pour le coup, c’est exactement l’effet que son discours me fait. Mais je continue, d’un ton plus léger. « Et ça… enfin le réconfort ? Vous pensez vraiment que c’est possible ? Que Dieu, les morts, les personnages issus de notre imagination peuvent vraiment intercepter ce qu’on dit et nous aider comme ça ? Et s’ils font rien, ça veut dire quoi ? Qu’on est pas assez important ? Que personne ne nous écoute ? » Je fronce les sourcils à mesure que je parle, me demandant qui pourrait bien m’entendre moi en vérité. Avant d’ajouter, hésitante. « … genre, ça existe pour de vrai les guérisons miraculeuses ? Vous déconnez un peu là non ? » Je me rends à peine compte que je viens de le bombarder de questions en fait. Ça se trouve, il va se lever et se tirer en me laissant à mes réflexions et à cette impression d’être encore plus seule au monde que jamais. La loose totale quoi.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyJeu 22 Mar - 17:50

Cette Sasha n’était décidément pas le genre de « cliente » que l’église recevait habituellement. Si les grenouilles de bénitier formaient une espèce en voie de disparition dans une ville aussi moderne et cosmopolite qu’Europolis, la majorité des chrétiens gardaient un certain sérieux (qu’ils appelaient respect, ou révérence) quand il s’agissait d’aborder la religion et prononcer le nom de Dieu. Beaucoup de fidèles savaient plaisanter… à condition de bien choisir ses sujets. Comme avançait un célèbre humoriste : « On peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui. »
Et derrière les boutades pétillantes de cette touriste de la religion, Christopher entendait quand même une réflexion non dénuée d’intelligence.

— En ce qui concerne la véracité des écrits, je dirais que cette tendance s’applique à une part bien plus grande de l’humanité. Hier les gens buvaient les paroles des prêtres jusqu’à l’ivresse,  ramollissant les cerveaux aussi sûrement qu’une bonne vodka. Aujourd’hui les gens s’imbibent des âneries colportées sur Internet ou dans les torche-culs de la presse à sensation. D’une certaine manière, il est plus facile de se conformer au système de croyances de son groupe social, plutôt qu’amorcer une réflexion profonde et sans tabou pour chercher sa propre vérité.
Mais vous savez, concernant la Bible par exemple, la plupart des chrétiens modernes s’accordent à y voir un recueil de métaphores porteuses de sens. Une sorte de manuel de bonne conduite rédigé de manière sibylline, comme tous les textes anciens. D’ailleurs, le gentil Jésus avec ses paroles d’amour a souvent plus de succès que le Dieu colérique et punisseur.
En tout cas, j’aime bien votre interprétation de ma petite histoire de SDF, même si ce n’était pas du tout intentionnel.


Chris s’esclaffa. Il plaisantait rarement ainsi avec des adultes. Il en allait tout autrement chaque premier dimanche du mois, lorsque le policier au repos animait des activités avec les enfants de la paroisse. Tout le monde riait beaucoup à ces occasions, mais cela se passait généralement dehors, et Dieu était rarement objet de bouffonnerie (les gamins avaient la fâcheuse habitude de moucharder les blagues à leurs parents, qui répétaient au pasteur, lequel tirait ensuite les oreilles de Christopher).

Son rire s’étrangla quand Sasha le compara à un type masqué qui cogne des méchants (l’image à deux doigts de la vérité était plus embarrassante que l’alternative travelo amateur de karaoké). Comme le combattant clandestin ne se voyait pas mentir ou jouer les drag queens, il choisit la dérobade en espérant (priant) que ce moulin à questions passe à autre chose.

— Vous avez beaucoup d’imagination, vous devriez penser à écrire pour le Continental Globe !

Heureusement, elle enchaîna vite sur le baptême. Ou malheureusement, car les thèmes de ce genre provoquaient systématiquement une crise de sieste aiguë durant ses jeunes années de catéchisme.

— Déjà, le baptême est une cérémonie spécifique au christianisme. C’est un peu comme une fête d’accueil au sein de l’Église, mais avec des dragées et de l’eau bénite au lieu d’apéritifs. D’autres religions ont sûrement des cérémonies semblables, mais je ne saurais me montrer plus précis sans Wikipédia sous les yeux. En tout cas, le baptême n’est évidemment pas nécessaire pour être croyant. La foi est une question individuelle et intérieure, d’ailleurs elle est rarement constante.
Il est relativement facile de passer d’une religion à l’autre à notre époque, du moins à Europolis. Certains cumulent même plusieurs religions, piochant ici ou là ce qui leur plaît. Cela dit, les cultes réagissent un peu comme les banques, chacun essaie de garder ses ouailles !


La jeune femme accepta ensuite le pilulier, mais continuait à faire preuve de méfiance. Comment pourrait-on lui reprocher ? C’était plutôt une marque d’intelligence, ou le fruit de mauvaises expériences. En tout cas, Chris était rassuré d’apprendre que Sasha vivait correctement. S’il lui arrivait d’endosser la casquette de travailleur social dans son métier de policier, enquêter et rabrouer les criminels figuraient davantage dans ses cordes.

— Aucune arnaque. Il est vrai que l’entraide n’a plus beaucoup la côte de nos jours, alors que les gens devraient au contraire se serrer les coudes pour affronter les moments difficiles. Mais je serai catégorique sur ce point : vous trouverez plus d’altruisme dans ce genre d’endroit (Chris lève les yeux et les mains, paumes vers le haut, pour désigner l’église) que dans la rue. La charité fait partie des piliers de la chrétienté. Certains cyniques avanceront que le don n’est que de la poudre des yeux, et que les chrétiens agissent ainsi pour s’acheter un ticket menant au paradis. À titre personnel, j’en classerais très peu dans cette catégorie. En tout cas, c’est quand vous voulez pour le repas !

Sasha réagit comme une personne sensée à la version Christopher Hart, digne d’un rockeur sous LSD, du tube Dieu est-il à l’écoute ?
Elle le juge bizarre, comme nombre de ses collègues policiers l’ayant affublé du surnom « Monk ». Au moins, elle ne se gêne pas pour le dire à voix haute et ne semble pas sarcastique.

La longue maladie de sa mère avait poussé l’Anglais à chercher une issue dans toutes les directions, y compris les moins catholiques. De même, sa mort, et plus encore celle de Lauren, avait poussé Chris à s’interroger sur l’après-vie (le néant, ou autre chose ?). Toutefois, un homme comme Christopher était incapable d’aligner dix pages de la Bible ou de la Bhagavad Gita sans s’endormir (s’il n’était pas politiquement incorrect, ce traitement remplacerait avantageusement les somnifères). Alors il s’était contenté d’écumer les résumés sur Internet, avec une lecture entrecoupée de bandeaux publicitaires CALL 123456789 AND TALK TO GOD (6 eurodollars la minute) et autres SEND A KISS TO OUR LOVED ONES BEYOND (3 eurodollars). Il y avait même un mystérieux CHAT WITH ELVIS RESURRECTED.

— Oui, je pense que d’une façon ou d’une autre, ce genre de lien et retour bénéfique est possible. Ou du moins, que c’est idée envisageable et porteuse d’espoir. Quand on y pense, la physique nous apprend que nous sommes particules, énergie et information. Le phénomène d’intrication quantique, considéré comme délirant au siècle dernier, lie ces particules sur des distances potentiellement infinies. Je ne suis qu’un f… (Chris faillit lâcher « flic », mais il ne souhaite pas révéler sa profession trop souvent source de préjugés) fonctionnaire, pas un théosophe, un philosophe ou un physicien, alors ne m’en demandez pas plus. Des têtes grosses comme des pastèques (Chris lève ses mains ouvertes de chaque côté de la tête pour mimer une grosseur exubérante) ont prononcé maints discours, écrit des ouvrages en pagaille et mené des recherches pléthoriques sur le sujet sans trouver de réponse définitive. Alors adhérez à ce qui vous apporte du réconfort, au pire on vous collera une étiquette de catholique, protestant, zoroastrien, wiccan, néodarwiniste, relativiste ou adoratrice de la vache sacrée selon vos croyances.

Pour le policier qui basait son travail sur des faits concrets et non des concepts abstraits, le sujet des guérisons était en revanche plus tranché.

— Oui, les guérisons miraculeuses existent. Le terme est péjoratif lorsqu’il est employé au sens religieux, mais les médecins parlent de guérisons inexpliquées ou rémissions spontanées pour décrire le même phénomène. Ou encore d’effet placebo puissance mille (Chris rit à nouveau). C’est une simple question de vocabulaire. Bon, vous avez encore moins de chance de guérir miraculeusement que de remporter le jackpot au lotto européen, mais il y a quand eu même une flopée de gagnants. Quant à savoir si un autre facteur que le hasard entre en jeu, comme pour le reste on aimerait penser que oui, mais qui peut l’affirmer ?
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyLun 9 Avr - 11:45


Ce type est un peu bizarre. Mais bizarre cool, pas bizarre, j’ai envie d’aller me planquer sous le banc en attendant qu’il ait fini de s’intéresser à moi. Alors ouais, je sais, je continue quand même de me méfier, c’est de toute façon pas mon genre de baisser ma garde rapidement, même si je finis toujours par parler un peu trop. Pourtant, je dis jamais rien de directement perso ou qui pourrait préjudice à qui que ce soit. Ou, si c’est le cas, j’arrive à me convaincre du contraire. En tout cas, il a un raisonnement intéressant et qui change des prêchi-prêcha que j’ai pu entendre jusque-là. Enfin, faut dire que d’habitude c’est limité entre « vous allez tous périr dans les flammes de l’enfer, repentez-vous » ou « dieu n’existe pas ». Du coup, ça donne une autre option qui mérite d’être écoutée. Surtout maintenant que j’arrive à peu près à faire le point et à plus avoir l’impression que ma tête va éclater en mille morceaux. Bon, je l’ai toujours un peu, on va pas se mentir, mais j’arrive à peu près à donner le change, je crois. « Et du coup, votre manuel de bonne conduite-là, vous pensez qu’il y a du vrai là-dedans ? Ou que c’est juste un ensemble de contes pour empêcher les gamins de faire des conneries ? Comme l’histoire du petit chaperon rouge pour éviter que les filles aillent voir le loup trop tôt ? M’enfin, si c’est le cas, l’histoire de marcher sur l’eau ou multiplier les pains, ça me laisse un peu perplexe niveau interprétation quand même… hum. » Je me tapote le nez, un peu songeuse quand même alors que je souffle, à mi-voix. « J’me demande vaguement si c’est pas du blasphème, même pour une agnostique, de voir Dieu comme un SDF. Y a quand même un truc qui me gêne. A croire qu’on a des habitudes ancrées difficiles à virer hein…»

Je me frotte le nez sans faire vraiment gaffe alors que j’essaie de l’imaginer avec un masque en train de tabasser des gens. Ou comme dans les trucs de catch. Je penche la tête sur le côté à sa répartie avant de secouer la tête. « Nan, vous avez une tête à faire ce genre de trucs. Ou alors à balancer des chaises sur des types en combinaison aussi… Hum. Je sais pas trop en fait. Bref…» J’arque un sourcil dubitatif avant de reprendre sur la religion, le baptême et ce genre de trucs. Donc je parle jamais en temps normal Parce que j’y pense pas vraiment, que je sais même pas si suis baptisée ou pas. Ca craint un peu non ? Je me demande si je dois lui dire mais, en attendant, je l’écoute avec attention. « … un pot de bienvenue dans le monde de Dieu… c’est concept, même si je préfère un apéro à l’eau bénite. » Je laisse filer un silence pensif avant de reprendre, un peu plus hésitante. « C’est… marrant. Comment vous parlez de la Foi. Y a que les gens qui croient vraiment qui peuvent en parler comme ça je pense. Même si elle a pu être changeante donc. Et les gens continuent de se faire baptiser alors ? Ca marche toujours comme commerce ? » J’ai un regard curieux autour de moi, me demandant si les gens arrivent vraiment à trouver la paix intérieure ou je sais pas quoi dans le même genre dans le coin.

Et du coup, je me méfie quand même un peu. Parce qu’il est trop sympa. Si, si, je vous jure, c’est possible. C’est même souvent louche les mecs trop sympas. « Disons que les gens vont se demander à quel moment vous allez les planter si on vous propose un coup de main. C’est devenu naturel d’être méfiant. » Surtout quand on voit les résultats quand on fait confiance. Je suis son mouvement des yeux, un peu sceptique avant de me mordiller un ongle un peu nerveusement. « Vous pensez que les gens peuvent encore être sympas juste… par principe ? C’est ça l’idée ? » J’avoue, l’idée me laisse un peu sur le cul. Et je me demande à quel point je passe pour la pauvre petite fille qui n’a connu que malheur et désolation à poser ce genre de questions. Pourtant, je m’en sors pas si mal. Si on occulte mon train de vie et mes addictions. Et ma méfiance. Et le fait que j’ai personne sur qui compter. Et… bon okay, on va éviter de trop réfléchir à tout ça hein. Alors je lâche, sans même y réfléchir. « Vous savez qu’ils font des super hot-dogs au chili au bout de la rue ? Enfin à l’angle. Je sais pas si c’est vraiment du chili mais, au fond, y a des trucs que même Dieu ne doit pas savoir. »

Mais voilà qu’il reprend, à utiliser tout un tas de mots hyper chelous. Et je bats des cils à l’écouter, avant de plisser des yeux en soufflant, avec un rire un peu incrédule. « Vous essayez de m’embrouiller là un peu non ? Avec vos mots super savants. L’intrication quantique, c’est quoi ce délire ? » Je me tapote le nez avant de reprendre, d’un ton plus sérieux. « En gros, vous êtes en train de me dire que, quoi que je choisisse, tant que je crois en quelque chose, c’est bien ? » Si c’est ça, il est encore plus tordu que ce que je pensais en vrai. Mais c’est intéressant comme concept, quand bien même je me vois pas trop adorer des vaches. J’ai une moue au reste de ses propos avant de hausser une épaule. « Mouais, enfin comme le loto donc… autant dire que je peux m’assoir sur une guérison miraculeuse et que je vais devoir me contenter de cachetons qui feront même plus l’affaire dans quelques mois. Je dois remercier Dieu pour ça aussi du coup ou pas ? Je me rends pas compte. »
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Christopher Hart
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMar 10 Avr - 19:51

Sasha avait une façon amusante de poser les questions et de résumer les réponses. Christopher n’avait pas encore mis le doigt dessus, mais à présent elle lui rappelait Charles «Good Jokes», un farceur qui faisait toujours rire la classe de catéchisme (et s’arracher les cheveux du prêtre) avec ses suppliques marrantes. Le jeune Hart ne s’était pas endormi une seule fois pendant le trimestre où Good Jokes s’asseyait parmi eux. L’impertinent fut renvoyé pour insubordination et blasphèmes à répétition, expulsion qu’il prit avec le sourire : « Quand le tonnerre gronde, les cul-bénis redoutent la colère divine, alors que c’est juste Dieu qui lâche un bon gros pet ! La pasteur est pareil, il rage parce qu’il est constipé, pas de quoi en faire un drame. »

— Je pense qu’il n’y a quasiment rien de vrai au sens historique du terme. Un peu comme les films « inspirés d’une histoire vraie » où le décor et les personnages s’appuient un contexte réel, mais les événements sont presque tous fictifs afin de créer une histoire sympa, un récit porteur de messages et qui parle à ses contemporains. Un peu comme l’Épopée de Gilgamesh et l’Odyssée d’Homère, ou même la Mahabharata sanskrite, c’étaient les best-sellers de l’antiquité !
Concernant la multiplication des pains par exemple, on m’a appris que c’est un symbole de partage et de fraternité. Le pasteur pourrait vous l’expliquer mieux que moi, mais en gros, cela dit que Dieu et la Création fournissent suffisamment de nourriture pour tous, et que ceux qui possèdent doivent partager avec ceux qui sont dans le besoin. C’est une valeur forte du christianisme, même si ça peut faire tristement sourire quand on s’intéresse au passé et même au présent.
Quant au miracle de marcher de l’eau, eh bien…


Christopher fronça les sourcils et se frotta la barbe, cherchant dans ses souvenirs la dernière fois où il en avait entendu parler. Tout ce qui lui revenait, c’était la messe d’un lendemain de combat difficile, où sa tête bourdonnait et son oreille gauche sifflait pendant le prêche du pasteur. « J’ai dû interpeler des voyous très agressifs », justifiait-il quand il se présentait avec une gueule cassée.

— … j’ai oublié, désolé. Et pour une agnostique, la question de Dieu est encore plus simple à trancher, car selon dans cette doctrine, l’absolu est inaccessible à l’esprit humain. Chaque représentation du Divin émane alors d’une création humaine qui n’approchera jamais la Vérité.


Malgré la boutade du combattant clandestin pour esquiver le « vous avez une tronche de », la jeune femme continua de le fixer en penchant la tête, comme si elle imaginait l’homme devant elle avec le masque de Stubborn. Bon sang, elle m’a vu combattre ou elle a un genre de sixième sens ? songea-t-il un instant.
Sasha n’avait pas vraiment l’allure des filles qui traînaient à ce genre de soirée brutale, pas plus que celle d’une propriétaire de carriole qui gagnait sa vie en lisant dans une boule de cristal (ou les feuilles de thé importé de Chine, ou les entrailles de corbeau abattu à Eden Park).
Ne rien dire, sourire bêtement l’air de rien comprendre. Hop, problème réglé. Question suivante.


Le baptême. « Pot de bienvenue. Apéro à l’eau bénite ». Cette femme espiègle lui faisait penser de plus en plus à Charles. Et comme Charles, elle le faisait marrer dans ce grand bâtiment presque vide, l’écho de ses éclats de rire résonnant comme si Dieu lui-même y répondait (la version Bruce tout-puissant, avec Morgan Freeman dans le rôle de Dieu et… du sans-abri).

— Je crois que votre idée d’apéro ferait plus recette que les baptêmes. La pratique tombe lentement en désuétude, mais les gens ont toujours aimé célébrer les événements importants comme la venue au monde d’un enfant. Les mariages à l’Église aussi se font rares, surtout que la moitié aboutissent à un divorce. En fait, ce sont les cérémonies funèbres qui marchent le mieux, quand il n’y a plus rien d’autre que la vie éternelle ou le néant…
Et vous avez peut-être raison pour la Foi. Mais il est difficile d’évoquer ces choses-là, surtout quand on doute.



Christopher aussi était plutôt méfiant, mais par la force des choses, non par nature. D’abord parce qu’il était lieutenant de police, et la suspicion faisait nécessairement partie du boulot, comme si on endossait une paire de lunettes grossissant tout ce qui est louche. Ensuite parce que sa compagne l’avait trompé sur ses activités illégales (et peut-être d’autres choses…) pendant des années. Depuis, il accordait difficilement sa confiance aux collègues et personnes de pouvoir, mais restait ouvert et conciliant avec les simples civils comme Sasha. Voir le mal et le mensonge sur chaque visage romprait le fragile équilibre de sa santé mentale, plus encore que les coups de butoir qu’il prenait régulièrement sur la tête.
Quoi qu’il en soit, la jeune femme n’avait pas dû avoir une vie facile pour voir un couteau dans chaque main tendue.

— Je vous comprends, et d’une certaine manière je vous approuve. Pour moi la méfiance c’est un peu comme la peur : un mécanisme utile, indispensable à la survie. Il faut savoir écouter ses conseils, mais sans la laisser gouverner nos vies. J’imagine que la vie n’a pas été tendre avec vous pour avoir une vision aussi pessimiste de vos semblables, mais il y a beaucoup de gens bien intentionnés à Europolis. Ils ne sont pas forcément les plus sympathiques en apparence, d’ailleurs, mais entre une gueule bourrue qui me souhaite du bien et une gueule d’ange qui veut abuser de moi, personnellement je choisis le grognon sans hésiter. Et puis, on ressent un bien fou quand on réussit à aider quelqu’un, ça a tendance à dérider les visages les plus crispés.

Le policier leva les yeux en étirant les lèvres, repensant aux côtés positifs de son métier, les nombreuses enquêtes et interventions qui avaient permis de soulager des familles angoissées, des victimes tremblantes de terreur, des enfants au regard vide. Ces moments, en plus des bons gestes du quotidien comme aider sa voisine âgée à porter ses sacs de course, donnaient un sens à sa vie et son engagement.


En revanche, Christopher fit la moue à l’évocation du hot dog, figure de proue de la malbouffe dégueulasse.
Le sportif suivait depuis plus de deux ans un régime strict grâce auquel il s’était bâti un physique de boxeur mi-lourd. Compléments nutritionnels, shakes protéinés, tout était bon pour soutenir la discipline intensive qu’il s’imposait. Cumuler les heures d’entraînement ne menait à rien sans une alimentation adéquate. Ainsi, ce qui entrait dans sa bouche devait servir à le maintenir en forme, non seulement pour ses combats clandestins, mais aussi dans la vie de tous les jours.
Toutefois, le spartiate était prêt à faire une exception si partager ce menu immonde pouvait apporter un peu de joie à une personne qui semblait voir le monde en gris plutôt foncé. Contrairement à Sasha, ce n’était pas l’authenticité du chili qui l’inquiétait le plus, mais celle de la viande. Chris ignorait quel imbécile avait eu l’idée d’appeler ce truc chien chaud, mais ça ne mettait pas du tout en confiance.
Le paroissien regarda sa montre.

— Il est encore un peu tôt, mais si vous voulez y aller, je vous offre la tournée. En plus, marcher un peu aidera peut-être à résorber votre mal de tête. L’exercice physique est bon pour le cerveau. Par contre, si votre chili est une fichue recette satanique, je demanderai à être remboursé.

Un sourire en coin se dessina sur le visage du trentenaire.


La remarque de Sasha sur l’intrication quantique indiquait qu’elle n’avait pas suivi de longues études, ou s’était spécialisée très tôt dans un domaine non scientifique. Lui-même n’avait pas appris le concept à l’école (le sujet fut quand même évoqué à la fin du lycée), mais dans les magazines qu’il feuilletait au cours des longues heures de planque (passer le 200e niveau sur Candy Crush 18 ou mater des vidéos pour adultes le branchait moins que ses collègues).

— Je ne suis pas assez compétent pour vous l’expliquer. Mais vous pourrez vérifier sur Internet, c’est tout ce qu’il y a de plus sérieux.
En ce qui concerne vos croyances, ou plutôt l’objet de votre croyance, je dirais que c’est bien tant que cela fait de vous une personne meilleure. Vénérer le monstrueux Cthulhu ou Satan risque de vous entraîner dans l’abyme, là où prier Wonder Woman ou Jésus Christ peut apporter du réconfort et stimuler les bons aspects de votre personnalité.
Quant au mal dont vous souffrez, je ne fais pas partie des masochistes qui remercient Dieu pour les épreuves et les souffrances que la vie nous inflige. Certains le font. Je crois en revanche qu’il est sain de les accepter, et d’essayer d’y voir une contrepartie positive. Je ne peux pas parler pour vous, mais vos maux de tête ont peut-être une origine ou une conséquence bénéfique. En tout cas je vous le souhaite, ce serait vraiment triste sinon.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyLun 23 Avr - 16:47

J’ai toujours eu tendance à interpréter les trucs à ma sauce. Souvent, ça déplait, on va pas se mentir. Les gens n’aiment pas qu’on déforme leur réalité, qu’on essaie de voir les choses différemment. Ils n’aiment de toute façon pas la différence tout court, j’ai bien pu le voir avec tout ce qui se dit sur les gens comme moi. Je me demande d’ailleurs ce qu’il penserait, ce gars qui a l’air si cool, s’il savait. Que je suis une erreur de la nature, un monstre, un truc à éradiquer. Son Dieu, il penserait quoi de tout ça ? Je fronce les sourcils à cette pensée avant de focaliser de nouveau mon attention sur Christopher donc. « Le Mahablala ? C’est quoi ce truc ? Et… ouais je crois que je pige l’idée. C’est comme l’histoire du petit chaperon rouge qu’on raconte pour que les filles évitent de se faire manger par le grand méchant loup, au sens propre ou figuré. Sauf que là, on parle quand même d’un bouquin pour lequel des milliers de gens se sont entretués pendant des siècles. Ça vous file par le vertige vous ? Qu’il y ait des types prêts à tuer parce qu’ils pensent que ces récits sont la seule vérité ? » Moi en tout cas, ça me fait un peu flipper mine de rien. Parce qu’on sait tous de quoi les hommes sont capables sous couvert de la religion. Et si ça recommençait ? Et si c’était nous la prochaine cible ?

J’ai quand même un sourire en le voyant réfléchir au miracle de marcher sur l’eau et je souffle, d’une voix plus douce. « C’est peut-être aussi pour nous rappeler que tout est possible. Ou qu’il faut pas se fier aux illusions. Donc en gros, on pourra jamais savoir à quoi ressemble Dieu sinon notre cerveau exploserait ? Un truc dans le genre ? » Je fronce le nez, la mine pensive, essayant de l’imaginer ou, pire encore, le résultat de mon cerveau qui explose. Remarquez, vu mes crises de migraine, ce serait pas bien compliqué de savoir l’effet que ça pourrait faire. J’essaie un instant de l’imaginer lui, en catcheur et j’avoue, c’est plutôt marrant. Mais ça passe aussi vite que c’est venu, d’autant que ça semble pas vraiment l’intéresser. Pourtant, ça doit être un spectacle plutôt marrant au final.

Mon sourire se fait plus large quand son rire résonne dans l’église. C’est agréable à entendre en fait, plus que je l’aurais cru. Ça me fait oublier mon mal de crâne et tout ce qui peut aller de travers d’entendre un son aussi joyeux, spontané et qui, surtout, ne semble rien demander en contrepartie. Pour un peu, ça ferait presque autant d’effet que les médocs. Pas totalement, faut pas déconner. Mais c’est… chouette ouais. Vraiment. « J’ai toujours de bonnes idées. Et en gros, les gens fêtent les trucs qu’ils peuvent pas… expliquer. Enfin, on peut expliquer la naissance d’un enfant mais c’est ptet pour donner un sens à sa vie, pour se dire qu’il sera protégé ou un truc du genre. J’aurais bien aimé être baptisée tiens. » J’ai dit ça d’une voix songeuse avant d’ajouter, toujours sur le même ton. « Si ça se trouve, je le suis et je suis même pas au courant. » Peu probable, on est bien d’accord. Et je pense la tête sur le côté alors que je le fixe et que je souffle, d‘une voix douce. « Vous doutez ? » Peut-être que ça se demande pas ce genre de trucs. Mais je suis plus à une bourde près je crois bien. Et puis, il a l’air vraiment sympa comme type, pour un peu je commencerais presque à me sentir en confiance.

Et je laisse filer un silence avant de hausser une épaule. « Il y a pas beaucoup de gens bien intentionnés nulle part. Disons juste que c’est plus facile de voir le bien chez les gens quand on a pas été majoritairement confrontés qu’à des connards ou des personnes qui vous voient comme une marchandise. Ça doit jouer sur ma façon de voir les choses. Mais… j’essaie. De pas me fermer totalement. Et je me fie plus aux apparences depuis longtemps en tout cas. » Je repense à ma rencontre avec l’autre taré, qui m’a proposé d’aider un gamin malade. Ça me fera du bien de faire ça ? Difficile à dire. Pourtant, je vais tenter le coup. Alors, forcément, j’acquiesce au reste de ses propos, le regarde perdu un peu dans le vague. « On ressent un bien fou quand quelqu’un essaie de vous aider en tout cas. » En tout cas, quand il accepte ma proposition de hot-dog au chili, je peux pas m’empêcher de lui décocher mon plus beau sourire. « C’est jamais trop tôt pour du chili. Et il sera ptet diablement bon, vous savez pas ! » Bon, j’ai quelques doutes, on va pas se mentir mais, maintenant que le mal de tête commence à passer, j’ai vraiment besoin de manger un truc. Pour éviter que le médoc me ronge l’estomac par exemple.

Je le fixe un instant, un rien sceptique, avant de rétorquer, de nouveau pensive. « Et comment on sait qu’on est une meilleure personne ? Je veux dire, ça fait ptet un peu con dit comme ça mais c’est pas un peu présomptueux de se croire meilleur parce qu’on a filé une pièce au clodo du coin ? Ou qu’on a aidé une vieille à traverser la route sans qu’elle se fasse shooter… » Je grimace avant de continuer avec un sourire désabusé. « On a rien sans rien ouais. Et on peut dire que j’ai des… aspects positifs. Sauf qu’à choisir, j’aimerais autant ne rien avoir du tout. » Je me demande si ça va lui mettre la puce à l’oreille tiens du coup. Et s’il va me poursuivre en me jetant de l’eau bénite.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMer 25 Avr - 19:40

— C’est comme une blague Malabar, mais en beaucoup plus long et en moins drôle, répondit-il aussitôt à la question de Sasha sur le texte mythique de l’hindouisme.

Une boutade que Charles «Good Jokes» aurait pu sortir, utile pour détendre l’atmosphère en préambule d’un sujet beaucoup plus grave : les conflits religieux.

— Vous avez raison, mais je tiens à apporter un complément à votre analyse. Nos ancêtres s’entretuaient déjà avant même l’apparition de l’écriture, nous sortons de trois guerres mondiales qui se sont succédé au cours des 140 dernières années, sans motif religieux, causant des millions et des millions de morts ainsi que d’autres ravages sans précédent. Personnellement, c’est l’espèce humaine qui me donne le vertige, plus que tous les textes religieux réunis. Chaque fois on se dit « plus jamais ça, finie l’horreur » et ça recommence… en pire. Nous n’avons pas besoin de Dieu ou de récits mystico-fantaisistes pour nous infliger du mal, pour nuire aux autres. La criminalité à Europolis, soi-disant le plus bel étendard de notre civilisation, en est la preuve concrète pour les Européens privilégiés que nous sommes.
Cela n’excuse aucunement les doctrines nauséabondes, mais selon moi, les croire à l’origine de tous ces maux serait leur donner trop d’importance. À ce propos, la chrétienté a réalisé un gros travail de tri dès le IVe siècle avec la séparation de l’Ancien et du Nouveau Testament. Ce dernier est nettement plus spirituel et civilisé. Je pense que si les gens s’inspiraient davantage des paroles de Jésus, notre monde tournerait mieux.


Une fois encore, Sasha se fendit d’une interprétation bien à elle sur les miracles de la Bible. Elle montrait par là qu’elle réfléchissait, bien plus que les rigoristes qui suivaient chaque verset à la lettre.

— Oui, votre interprétation est tout aussi valable. D’ailleurs une bonne fable peut s’interpréter de plusieurs façons.

Christopher se mit à rire de nouveau à l’image du cerveau qui explose. Peut-être une fan de Cronenberg avec la scène culte de son film Scanners ?

— Je crois que je suis plus soft que vous sur ma façon de voir les choses. Disons qu’un animal ne peut s’imaginer ce qu’est un être humain, même une baleine avec son cerveau gigantesque. Le fossé est encore plus grand entre l’Humain et ce qu’on appelle Dieu. Le concept est donc insaisissable pour nos esprits, ce serait comme essayer de suivre du regard une particule se déplaçant à la vitesse de la lumière.

Après Charles «Good Jokes», Chris se disait qu’il venait de rencontrer Sasha «Good Ideas». S’il réagissait avec un air amusé aux suggestions de la comique de service, il ne sous-estimait pas la pertinence sous-jacente de ses propos.

— Vous pourriez travailler dans la comm’ ou le marketing. Ou produire des sketchs humoristiques sur EuroTube. Ça rapporterait pas mal, pour votre traitement médical par exemple.

La curiosité du policier s’éveilla quand la jeune femme mentionnait la possibilité d’être baptisée dans qu’elle le sache. Puisqu’elle avait la langue bien pendue et qu’elle semblait aller mieux, il se hasarda à une question plus personnelle, sans être trop directe :

— On ne vous a pas dit comment vous avez vécu la première année de votre vie ?

La femme qu’il soupçonnait d’être orpheline pourrait facilement couper court ou s’étendre sur le sujet, selon sa convenance. D’innombrables raisons plus ou moins terribles pouvaient expliquer cette ignorance. Son métier de flic lui avait appris que chacun gérait les blessures passées à sa façon et sauf cas particuliers, il respectait la vie privée des autres.
De toute manière, les bonnes intentions ne remplaçaient pas les compétences d’un psychologue pour aider ses semblables (d’autant que son propre équilibre mental était fragile).

Christopher se contenta d’opiner du chef à la question directe sur ses doutes. Tous deux avaient déjà abordé ce point précédemment, et il ne souhaitait pas s’étendre davantage.
En revanche, il afficha une expression réjouie en réaction aux efforts de Sasha pour s’ouvrir des autres, ainsi qu’au bien-être éprouvé lorsqu’on reçoit une aide désintéressée. Elle affichait un sourire sincère, et cette démonstration de joie valait bien plus que son salaire d’officier de police (sauf au moment de payer les factures, où pousser mémé dans les orties devient alors plus acceptable…).

— Bon, c’est parti pour un hot dog au chili alors ! Enfin, pas au Chili le pays hein, le temps d’arriver là-bas ce n’est pas un petit creux que vous aurez à l’estomac, mais un cratère de météorite…

L’humour de Sasha (et le souvenir de ce bon vieux Charles) semblait déteindre sur l’Anglais, sauf que son humour était aussi pourri qu’une pomme ayant passé l’année dehors. C’est l’intention qui compte, comme on dit dans ce genre de cas.

Le policier invita la visiteuse à se lever et l’accompagna jusqu’au parvis de l’église. Il faisait toujours un froid de canard et le paroissien releva le col de son épais manteau.
Maintenant qu’il tenait debout à côté de Sasha, Christopher réalisa qu’il la dépassait d’une tête, et que cette femme menue à l’allure inoffensive devait attirer les prédateurs comme des mouches.
Ils poursuivirent leur conversation sur le trajet menant au vendeur de hot dogs.

— Je ne trouve pas cela présomptueux. Un acte généreux nous rend meilleurs, point. Nul besoin de se tordre les neurones ou se plonger dans des bouquins de philo pour justifier cette évidence. Bien sûr, on ne devient pas miraculeusement quelqu’un de bien avec des petits gestes ici ou là. Certaines personnes mènent une vie foncièrement délétère et pensent se racheter une bonne conduite en se montrant gentil un jour par semaine, des idiots croient également s’acheter un ticket pour le paradis en donnant aux bonnes œuvres. La spontanéité et la sincérité de l’acte sont essentielles dans ce genre de chose.

Christopher ne fit guère le rapprochement quand la femme au talent insoupçonné lui parla de ses aspects positifs. Les personnes ayant développé des capacités extraordinaires représentaient une part infinitésimale de la population d’Europolis. En outre, seuls l’intéressaient les «spécimens» dangereux, les vrais monstres. En tant que policier, il était bien placé pour savoir que le bien et le mal se côtoient dans tous les ADN, et que la société a tendance à rejeter ce qu’elle ne connait ou ne comprend pas.

— C’est déjà ça, commenta-t-il. En définitive nous avons très peu de contrôle sur nos vies, nous pouvons juste nous efforcer de faire au mieux avec ce qu’on a et ce qui nous tombe dessus.

À une dizaine de mètres de la roulotte, Christopher demanda à Sasha de l’attendre un instant et partit seul à la rencontre du vendeur ambulant.
Il afficha sa mine de flic bourru (sourcils froncés, regard pénétrant, mâchoire serrée, bouche mauvaise : la totale), en emprunta la voix grave et menaçante.

— Écoute, mon vieux, je suis de la police et si tu offres le meilleur hot dog au chili de sa vie à la jeune femme là-bas (Chris désigne Sasha du menton), je te serai redevable d’un service. En revanche, si tu nous sers de la merde, je trouverai un prétexte pour t’envoyer au trou et ferai courir une réputation de pédophile à ton sujet. Compris ?

Le vendeur regarda l’homme qui lui faisait face d’un air apeuré, pivota vers Sasha, puis opina du chef après avoir dégluti difficilement. On aurait dit qu’il venait d’avaler un crapaud vivant, d’autant qu’il en avait adopté la couleur vert-de-trouille.
Oui, c’était de l’intimidation et de l’abus de pouvoir, mais le lieutenant y recourait parfois pour une cause qu’il estimait juste. Cette Sasha en avait visiblement bavé, elle vivait au quotidien avec des migraines qui continuaient à la faire souffrir (et peut-être d’autres afflictions). Cela valait bien une petite incartade inoffensive au règlement (Christopher ne mettrait pas pareille menace à exécution,  du moins pas pour une histoire de hot dog dégueulasse…).
Il reprit sa contenance de gentil paroissien, puis se tourna à nouveau vers Sasha avec un joli sourire, lui faisant signe d’approcher.

— C’est moi qui offre, précisa Christopher.

Ce vendeur a quand même intérêt à se surpasser, pensait-il.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyDim 20 Mai - 19:22

Je le fixe, un peu incrédule, avant de tousser un rire un peu nerveux. « … vous êtes bizarre quand même hein… mais bizarre cool. Donc c’est sympa, j’aime bien. » Bon, pas qu’il ait besoin de mon approbation sur sa façon de se comporter, mais tomber sur un mec comme ça pourrait presque me réconcilier avec l’humanité. Presque hein, faut pas pousser non plus. Et j’ai tendance à me méfier de tout le monde, à juste titre je dirais. Je l’écoute, plissant le nez alors qu’il me montre une vision que je pensais même pas exister chez des gens comme lui. Des gens qui n’ont jamais eu à galérer pour manger, qui ont pu profiter d’un système qui leur a été bien plus bénéfique qu’à moi. Autant dire que c’est déstabilisant et pas qu’un peu. Et je souffle, pensive. « Je vous avoue, je m’attendais pas vraiment à avoir ce genre de discussion… avec un mec comme vous. Pour autant, je pense que les humains aiment ça… devoir s’entretuer au nom d’un Dieu, d’une croyance. Ca leur donne une excuse pour laisser libre court à leurs instincts. Je pourrais vous parier que vous avez des criminels dans cette ville qui sont persuadés d’agir au nom de Jésus Christ. » Je hoche la tête avec une moue avant de reprendre, clairement moins convaincue que lui. « Sauf que les gens continueront de croire ça. Parce que c’est plus simple que de se dire que, dans le fond, c’est de notre faute. Parce qu’on a merdé à un moment et pas qu’un peu. Et que je sache, aucun Dieu n’a jamais voulu ça. Ou alors j’ai rien pigé à la base-même de la religion. Le coup de s’aimer les uns les autres quoi. Sauf que ça marche clairement pas comme ça. »

Au reste de ses propos j’ai un sourire. Une bonne fable ouais, c’est un peu tout ce que ça m’inspire, on va pas se mentir. Pour autant, c’est intéressant d’en parler, d’essayer de penser un peu différemment et de voir quelqu’un qui écoute mon point de vue. Parce qu’on va pas se mentir, je suis pas une intello, pas dans le sens premier du terme. Du coup, les gens m’écoutent pas trop quand j’essaie d’être un peu sérieuse. J’essaie pas souvent, d’accord, mais c’est l’idée. « Du coup, en gros, on peut même pas essayer d’imaginer à quoi Dieu peut ressembler… je trouvais mon idée plus fun quand même. Mais un peu plus… radicale du coup. » Et j’ai un rire au reste de ses propos. « Jamais pensé à ce genre de carrière. C’est plus safe de servir du café en vrai. Même si on se fait braquer un peu trop souvent quand même à mon goût. Le pire, c’est qu’on s’y habitue. Et en vrai, je suis même pas sûre qu’il existe vraiment un traitement pour ce que j’ai… juste des trucs pour faire passer la douleur… » J’ai un haussement d’épaules un peu fataliste avant de pencher la tête sur le côté. « Nan… dans les orphelinats russes on se préoccupe pas vraiment de fabriquer des souvenirs aux gosses. Remarquez, j’ai quand même eu une infirmière qui s’est prise d’affection pour moi et a même fini par m’emmener avec elle au final. J’ai eu de la chance dans mon malheur. » Je dis presque la vérité, c’est pas mal non ?

Et voilà qu’il hoche la tête quand je lui demande s’il doute. Je sais que ma question était un peu trop directe pour qu’on discute là-dessus mais j’avoue que je suis déjà étonnée d’avoir eu une réaction en vrai. Je lui souris, sincèrement, quand je continue, avant qu’on finisse par sortir de là pour aller chercher un hot-dog. Je plisse des yeux devant la luminosité qui me rappelle que mon mal de tête ne me laisse qu’un bref répit et j’inspire longuement pour me remettre les idées en place. Il arrive quand même à me faire pouffer de rire, sans même que je puisse m’en empêcher. « … c’est loin le Chili donc j’imagine. Je me suis jamais posé la question. Ca vient vraiment de là-bas le chili du coup ? » Question existentielle du jour donc. Plus importante encore que de savoir si Dieu existe peut-être. Certainement même. Je le fixe, curieuse, alors qu’on parle de bonté, de générosité et je souffle, amusée. « C’est marrant, à vous entendre, les trucs semblent vachement plus… simples. Évidents. Comme s’il suffisait juste de deux trois trucs pour que tout tourne bien. Enfin pas aussi facilement mais… voyez l’idée ? » Je me frotte le nez, un peu nerveusement, avant de hocher la tête un peu distraitement. « J’essaie. En tout cas. J’ai du mal parfois, mais je pense que c’est le cas de tout le monde non ? »

Quand il me demande de l’attendre, je m’exécute, un rien perplexe, le fixant de loin alors qu’il commence à papoter avec le type du stand de hot-dog. Je sais pas trop ce qu’il lui dit mais l’autre tire une tête de six pieds de long, comme s’il l’avait menacé de mort ou un truc du genre. Et, du coup, quand j’arrive, je plisse les yeux à son sourire avant de renifler en direction de la nourriture. Mon ventre gargouille aussi sec alors que je souffle, un peu sceptique. « Vous lui avez dit quoi ? On dirait qu’il a eu la trouille de sa vie ? Vous l’avez menacé de lui enfoncer sa moutarde dans le… enfin… un truc du genre ou quoi ? » Je vois pas trop ce que ça pourrait être d’autre du coup. Sauf si c’est genre un parrain de la mafia du hot-dog.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMar 22 Mai - 19:44

Vous êtes bizarre, dit Sasha comme si le flic en habit du dimanche samedi sortait tout droit de l’aile psychiatrique du Danvers Hospital. Christopher plissa les yeux, avant de se fendre d’un sourire lorsqu’elle précisa bizarre cool. Cool : la nuance qui changeait tout. La subtilité qui séparait les timbrés, les fêlés, les freaks du commun des mortels. À moins que Sasha fût également une freak à sa manière, une voisine de palier dans la galerie des gens trop originaux pour une société qui ne tournait déjà pas rond.
Le policier rejeta aussitôt cette pensée fantaisiste. La femme qui se tenait à côté de lui souffrait certes de migraines, mais à bien y réfléchir cela n’avait rien de surprenant. Derrière l’illusion de stabilité, plusieurs milliards d’êtres humains s’entassaient sur une immense boule recouverte d’eau et de terre, laquelle tournait autour du soleil à une vitesse vertigineuse et, comme si cela ne suffisait pas, pivotait sur elle-même en vingt-quatre heures. On se retrouvait donc tête en haut, tête en bas, tête dans tous les angles intermédiaires, minuscules grains de chair engagés à notre insu dans une course effrénée. Il devait bien exister certaines personnes que le voyage chamboulait plus que d’autres. Un genre de mal de Terre, comme il existe un mal de mer. Sacha appartenait peut-être à cette catégorie d’hyperspaciosensibles.
Naturellement, Christopher se garda d’exprimer cette théorie à voix haute. Être qualifié de bizarre cool, eh bien c’était… cool. Il n’allait pas gâcher son plaisir pour une idée fumeuse qu’on croirait sortie d’un trip sous LSD.

D’ailleurs, la suite était moins flatteuse. Ou plus flatteuse, selon le point de vue.
Je m’attendais pas vraiment à avoir ce genre de discussion… avec un mec comme vous.

La messe était dite. Soit Christopher avait omis de se coiffer avant de quitter son appartement et il affichait la chevelure en pétard d’un illuminé (semblable au « Doc » de Retour vers le futur après son expérience ratée), soit Stubborn commençait sérieusement à déteindre sur le policier.
Après tout, Sasha l’imaginait bien se couvrir d’un masque pour taper des méchants. Lui, Christopher Hart, le flic décrit jadis comme une gueule d’ange. Mais c’était avant la mort de Lauren, avant de ranger le rasoir « peau de bébé », avant les arènes clandestines, avant les hospitalisations en cascade, avant d’avoir la fatidique quarantaine en ligne de mire.
La vieillesse est une vraie saloperie dont Christopher ne goûtait encore que les prémices. Heureusement, les flics de terrain comme les combattants clandestins atteignaient rarement le stade final de cette maladie dégénérative. À coup sûr, l’Anglais cracherait son dernier glaviot avant de bouffer de la marmelade par un tuyau nasal et déféquer dans des couches XXL.

Un mec comme vous.

La remarque était d’autant plus percutante que Sasha faisait preuve d’intelligence dans ses réflexions. Christopher aurait pu déclarer avec la même sincérité « Je ne m’attendais pas à avoir pareille discussion avec une serveuse ». Mais à la différence de son interlocutrice drôle et impertinente, l’Anglais était trop poli (ou trop coincé) pour l’avouer. En outre, Sasha lui renvoyait un préjugé en pleine face, telle une enfant rieuse crackant le super mot de passe introuvable du code parental.

— En ce qui me concerne, vous mettez admirablement dans le mille pour une profane. Peut-être car il s’agit avant tout de nature humaine, et que vous semblez en connaître un rayon à ce sujet. Ce que vous dites me rappelle les procès de criminels de guerre, notamment le cas du procès Eichmann après la Seconde Guerre mondiale. Plutôt que de reconnaître leur responsabilité, les monstres se couvrent derrière l’obéissance, le devoir, le système. Soldat de dieu, d’une organisation criminelle ou d’un régime totalitaire, le principe est le même : on se dédouane sur une instance supérieure, une figure omnipotente ou un groupe dominant. Je ne sais pas si vous avez lu Hannah Arendt, mais vos paroles rejoignent ce qu’elle disait sur la banalité du mal. Un concept qui fait vraiment froid dans le dos.

Christopher ressentit un frisson lui parcourir l’échine. Car le sujet le concernait directement, le hantait davantage après chacune de ses actions répréhensibles. Comme tous les hommes, Chris avait sa part d’ombre et il craignait qu’elle le dévore.

Heureusement, le rire de Sasha empêcha le policier de sombrer dans une obscure mélancolie. Quand il est naturel, spontané, le rire guérit bien des tracas. En plus, c’est un remède gratuit et contagieux, sans effet secondaire néfaste. Meilleur que les anxiolytiques et antidépresseurs dans bien des cas.
Les gens drôles devraient recevoir une prime de l’assurance maladie pour les bienfaits qu’ils apportent à la société. Pour la légèreté dont elle faisait preuve, Sasha méritait une livraison quotidienne de hot dogs au chili.

Le policier préféra ne pas commenter la remarque de la serveuse sur les braquages. Ses lèvres s’amincirent pour mieux garder le silence, car il n’avait pas envie de révéler sa profession ou de lui mentir. Chris ressentit néanmoins un pincement dans la poitrine, comme après chaque témoignage de victime. Il ravala également la pointe de colère qui remontait de ses entrailles, semblable à un magma qui remontait de bouillantes profondeurs à l’évocation de mots honnis.

Bon sang, la femme qui se confiait à lui avait grandi dans un orphelinat russe. En comparaison, ses tracas de flic avaient la puissance d’un pet de caniche diarrhéique.

Pendant longtemps, le jeune Chris ne connut des Russes que leur représentation dans les Indiana Jones : géants stupides à la mine patibulaire, espions dotés d’un accent à couper au couteau, cuisiniers tranchant les légumes à la faucille et jouant du marteau pour réduire les pommes de terre en purée. Bref, les Ruskofs et leur froid pays n’avaient pas la côte, mais au moins ils faisaient rire.
Leur image se dégrada quand l’Europe déclencha une terrifiante guerre préventive qui s’acheva à la prise de Moscou. Durant toute cette période, les myriades d’articles et reportages dépeignaient un peuple brutal, dangereux, arriéré dans leurs mœurs, mais suffisamment avancé sur le plan technologique pour justifier les frappes militaires.

— Je suis vraiment navré pour vous. Je connais mal la Russie, mais si un quart de ce qu’on dit sur ce pays est vrai, alors votre enfance a dû être une période très difficile. Je n’en suis que plus reconnaissant envers cette admirable infirmière qui vous a offert son cœur et un avenir. Cette femme extraordinaire vit-elle aussi à Europolis ? Étiez-vous déjà en Europe au moment des conflits ? On a beau visionner des reportages à la télévision, aucun média ne peut retranscrire la vie, ou plutôt la survie, dans une zone de guerre…

En revanche, Christopher s’y connaissait davantage en matière de Chili (et de chili). Outre une bonne éducation, il devait son savoir hétéroclite à une passion tardive de sa mère : l’émission Questions pour un champion (disponible en replay pour 7 eurodollars par mois). Au cours de leurs trois dernières années de vie commune, Chris aimait s’assoir près de sa mère luttant contre le cancer et s’exclamer avec elle sur les sujets de culture générale.
Menton et doigt levé comme un professeur d’école élémentaire, le policier se montra pédagogue :

— Oui, c’est bougrement loin le Chili. C’est un pays très étiré d’Amérique du Sud, situé en bordure de l’océan Pacifique. J’ignore si le mélange épicé du même nom vient de là, mais je crois que le mot chili est un dérivé de l’espagnol chile, qui veut dire piment.

L’assurance de Christopher n’était qu’apparente.
Poser une colle à un lieutenant de police, c’était le meilleur moyen de le priver de sommeil. Cette question le turlupinerait jusqu’à ce qu’il trouve la réponse. Heureusement, une banale recherche sur EuroSearch suffirait à libérer son esprit de ce tourment culinaire.

Sur la bonté et la générosité, le policier opina une fois encore de la tête aux dires de Sacha.

— Oui, simple ne veut pas dire facile. Cela rejoint ce dont nous parlions plus tôt. Nous sommes imparfaits, nous avons nos faiblesses, nous « merdons et pas qu’un peu ». Et parfois c’est l’engrenage. Il faut du courage et de la persévérance pour essayer encore et encore, surtout quand on vit dans un environnement difficile. Céder à ses faiblesses demande moins d’effort qu’y résister. Du moins sur le moment, car tôt ou tard, il faut assumer les conséquences et payer l’addition

Une fois son numéro d’intimidation auprès du vendeur terminé, Sasha le gratifia d’une élégante théorie (mais où cherchait-elle tout ça ?) sur l’expression inquiète de ce dernier.
Christopher pencha alternativement la tête d’un côté puis de l’autre, comme s’il pesait les paroles de l’affamée avant de rendre son jugement. Il faut dire qu’elle n’était pas si loin de la vérité.

— Un truc comme ça, répondit-il sobrement. Mais il était question de chili, pas de moutarde.

Après les jolis principes sur lesquels ils venaient de débattre, le policier n’avait guère envie de mentir à cette jeune femme agréablement curieuse. Ni d’évoquer ce genre de menaces sordides (aussi fictives fussent-elles) avant d’ingérer un hot dog chargé aux épices.
Le vendeur passa d’ailleurs cinq fois plus de temps à préparer le premier, que Christopher laissa bien sûr au moulin à paroles qui l’accompagnait (il ne s’agissait pas seulement de galanterie, mais aussi d’éviter les questions fâcheuses).

— Alors, Sasha, votre verdict ? dit-il après qu’elle eut enfourné une première bouchée.

Un sourire amusé au coin des lèvres (du côté que Sasha voyait, mais pas le vendeur), Christopher jeta un œil au malheureux cuisinier en herbe.
Celui-ci déglutit. Sa peau s’humidifiait malgré le froid ambiant. Ses mains tremblaient en préparant le deuxième meilleur hot dog de sa vie.
Il préférait mille fois l’idée de Sasha aux menaces du policier, bien qu’il était fermement convaincu d’avoir affaire à un duo de cinglés.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptySam 23 Juin - 15:31

Il est ptet bizarre mais, au moins, il a l’air chouette. Et il a un joli sourire. Mais je sais que si je dis ça, je vais passer genre pour une salope ou un truc du genre. Alors que bon, clairement, c’est pas le truc qui m’intéresse qu’il soit mignon. Surtout qu’on va pas se mentir, dans le genre bizarre, je me pose là. Donc heureusement, il insiste pas trop et n’en demande pas plus. Et le reste de la conversation, si je m’y attendais pas du tout, est carrément intéressant, d’autant que c’est pas tous les jours que je m’interroge sur Dieu. Je me rappelle, l’espace d’une seconde, quand elle m’apprenait ces prières que j’ai oubliées depuis le temps. Elle avait l’air de tellement y croire, de s’y raccrocher comme un naufragé à sa bouée au beau milieu de la pire des tempêtes. Parce que c’est ce qu’est devenu notre monde. Une putain de tempête où chacun essaie de faire comme il peut. Et j’inspire longuement alors qu’il me répond et que je le fixe, partagée entre cette curiosité qu’il a su réveiller en moi et ce sentiment qu’il y aura toujours des questions sans réponse, mais qu’il ne faut de toute façon peut-être pas les chercher, quoi qu’on en dise. J’ai un mince sourire alors que je réponds, d’une voix plus douce, la migraine ayant enfin réussi à se faire plus diffuse, à retrouver cette place qui est la sienne habituellement. « Une profane… marrant comme terme. Mais pour ce qui est de la nature humaine… je dirais plutôt que j’en ai surtout vu le mauvais côté alors, forcément ça aide moyen à voir les choses en couleur non ? Et donc… au final… ça a toujours été comme ça ? C’est ce que vous me dites ? On fait du mal aux autres, on expérimente des trucs sur des gens qui ont rien demandé au nom de… d’un tas de trucs quoi. Ptet que le monde tournerait mieux si les gens assumaient leurs actes en fait. Parce que le coup du responsable mais pas coupable c’est pas mal ça aussi… Mais j’connais pas Hannah Arendt, elle a dit quoi ? »

Un truc qui a l’air de le déranger un peu en tout cas, tout comme l’évocation d’Erika me fait plus de mal que je l’aurais cru. Parce que, pour une fois, je peux parler d’elle un peu plus librement que j’ai jamais pu le faire, parce qu’avec ce type, même si je le connais pas, je me dis qu’il y aura enfin quelqu’un d’autre pour l’évoquer. Et parce que je réalise qu’à part moi, personne ne se souviendra jamais d’elle, ce qui est probablement la pire des injustices du monde, au moins. « Oh c’est pas si grave vous savez. Paradoxalement, quand on a rien connu d’autre c’est pas si horrible après tout. Après coup, maintenant que je vois comment est le reste du monde, je me dis que ouais, y a quand même mieux comme façon de grandir. Mais Erika a toujours veillé sur moi. » Je pique du nez avant de continuer, me mordillant nerveusement la lèvre. « … Elle est morte quand on a passé la frontière. » Je sais pas si j’ai envie d’en dire plus, si j’ai le droit. Après tout, s’il réfléchit deux secondes il aura bien compris où j’étais au moment des conflits. Alors, je me contente de souffler, d’une petite voix. « Y a rien qui retranscrit ce qu’on peut vivre quand les balles sifflent, quand on se demande si on sera toujours en vie le lendemain. Mais, au final, c’est pas plus mal que la plupart des gens ne connaissent pas ce sentiment d’insécurité permanent. Y a déjà assez à faire aujourd’hui dans cette ville non ? »

Et encore, je me dis que plus ça va, plus ça a l’air d’empirer pour être parfaitement honnête. Pourtant, j’aime cet endroit et tout ce qu’on peut y vivre, même si ouais, je risque plus souvent ma vie à ne pas faire partie d’une classe de gens qui peuvent dormir sur leurs deux oreilles tous les soirs. Mais je me rends compte que je peux vivre des moments cools, comme celui-là, alors que les choses avaient sacrément mal commencé pourtant. Et je pouffe de rire quand il lève le doigt, essayant de me faire un rien sérieuse, comme une élève appliquée que je n’ai jamais vraiment été. « Oh je vois. Donc le chili vient pas forcément du Chili. Cruelle déception mais je note que c’est un pays étiré au bout du monde. Je dormirais moins bête ce soir. » N’empêche que ça donne faim tout ça, surtout maintenant. Je me fais songeuse au reste de ses propos avant de continuer, fataliste. « On finit toujours par devoir payer l’addition en fait, alors je peux comprendre que certains aient envie de céder à la facilité, que le repas ait au moins été marrant. Enfin, façon de parler quoi... »

Je louche alors que je me retrouve avec un énorme hot-dog entre les mains, lui adressant un large sourire avant de rétorquer joyeusement. « Le chili c’est carrément pire que la moutarde. Chétait chuper fourbe quand même ! » Ouais, j’ai même pas attendu qu’il soit servi pour croquer dedans… ou même de finir ma phrase en fait. Et c’est le pied culinaire à mort. J’ai un long soupir de contentement avant de hocher vigoureusement la tête. « Cha déchire ! Pas bechoin de lui faire des trucs au chili ! » Quoi, ça se dit pas ? Mais si, surtout après tous les échanges qu’on a déjà eus.

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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyJeu 28 Juin - 19:57

Sasha commençait à se livrer un peu plus, passant progressivement des grands sujets qui interpellent l’esprit humain depuis la nuit des temps à des considérations plus personnelles.
Et plus la jeune femme se confiait, plus Christopher réalisait le fossé existant entre sa petite enfance idyllique et les années sombres qui avaient marqué Sasha de façon irrémédiable.
L’Anglais hésita entre la réconforter de paroles rassurantes et lui exposer des faits historiques dans toute leur laideur. Mais Sasha évoquait à juste titre une palette de couleurs : rien n’était totalement blanc ou noir en ce monde.

— Croyez-moi, je sais ce qu’il en est d’être confronté à la noirceur de l’âme humaine (Chris ne désirait toujours pas révéler la nature de son métier) et je comprends cette vision biaisée. C’est déjà très bien d’en avoir conscience. « Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir », n’est-ce pas ? Le pire comme le meilleur se trouve à Europolis. Il suffit d’ouvrir les yeux, et de bien choisir ses relations dans la mesure du possible.

Le lieutenant de police tiqua lorsque Sasha mentionna des expériences sur des sujets non consentants. Avait-elle un lien avec l’affaire Brendt ? Christopher était mal informé des ramifications internationales de cet énorme scandale. S’il avait reçu l’ordre de traquer les évadés du Danvers Hospital et autres mutants, il n’arrêtait jamais personne sur ces simples critères.

— Vous faites sûrement référence au vaccin universel ? J’aimerais vous répondre que vous avez tort, mais l’humanité a toujours été cruelle et égoïste. Bienveillante et altruiste, aussi. Malheureusement, les personnes au pouvoir appartiennent souvent à la première catégorie. Je suis entièrement d’accord avec vous : tout le monde doit rendre des comptes. Des actes ignominieux sont perpétrés sous le couvert du secret pour justifier un quota de malades soignés ou de vies sauvées. Mais c’est à la société de décider, de juger et établir les responsabilités. Pas aux actionnaires qui en tirent le plus grand profit, ou à ceux qu’ils arrosent de billets.
Quant à Hannah Arendt, elle nous a laissé suffisamment d’écrits pour remplir une étagère. C’était une politologue et philosophe allemande d’origine juive, qui a dû fuir le régime nazi de son pays. Elle est surtout connue pour son œuvre sur le totalitarisme et la société moderne. Vous avez dit manquer d’éducation, mais les versions commentées et expliquées de ses ouvrages pourraient vous intéresser. Vous y trouveriez matière à réflexion, à défaut de réponses que nul ne possède.


Sasha poussa ensuite les confidences sur sa « marraine » Erika et cette période de guerre, horrible et incompréhensible à ceux qui ne l’avaient pas vécu – comme Christopher.

— On ne peut souhaiter à personne de connaître les tourments que vous avez traversés. Je pense toutefois qu’en parler a du bon. D’abord pour honorer la mémoire des braves et des justes, comme votre Erika, ces héros anonymes qui ont montré ce que l’humanité avait de plus noble dans une période qui en manquait terriblement. C’est ce genre d’exemple qui doit inspirer les générations futures, plus que les « héros de guerre » et leur tableau de chasse orné de morts. Si les gens avaient un aperçu des malheurs qui se sont abattus sur des gens comme vous, peut-être qu’ils apprendraient à relativiser et se battraient pour en préserver Europolis.


Christopher leva les mains et se tapota le bout des doigts au commentaire de Sasha sur le chili et… le Chili. Dans une vie future, si pareille chose existe, il pourrait éventuellement devenir prof et ressentir la joie d’instruire son prochain. Sauf que les gamins préfèrent jouer sur leur smartphone, surfer sur les sites de cul ou suivre les comptes Instagram de célébrités aux allures de poupée Mattel plutôt qu’écouter un prof transmettre un savoir dont ils n’ont rien à foutre. Triste réalité. Cruelle déception.
À croire qu’il fallait subir de tragiques épreuves comme Sasha pour se forger un esprit curieux et brillant. Et fataliste, comme sa réaction sur la facilité le soulignait.

— Malheureusement, je crois que vous avez encore raison. Pourtant, avec ce raisonnement à court terme, on fait moins de repas et on le passe en moins bonne compagnie. Mais oui, on se goinfre bien en attendant…

En parlant de goinfrerie, la jeune femme plutôt malingre démontra une voracité stupéfiante qui laissa le lieutenant pantois.
Avant de rire à son tour, car il éprouvait une joie simple, naturelle et spontanée à voir cette personne à jamais meurtrie se régaler et manifester son contentement.
Christopher n’avait pas de hot dog dans la bouche, mais il savourait le moment comme le meilleur thé parfumé du monde (ses références culinaires différaient de la Russe…).

Il se tourna vers le vendeur et hocha la tête en signe d’assentiment, un généreux sourire en prime. Du grand méchant loup, le flic menaçant était passé au gentil Saint-Bernard.
Le cuistot de rue (qui était aussi Chilien que les pigeons déversant leur fiente assaisonnée sur les toits de l’Église) souffla de soulagement et tendit le hot dog suivant au policier. Ses mains tremblaient encore légèrement (le pic de cortisol produisait encore son effet) mais il ne serrait plus les fesses en imaginant ce qui risquait de lui arriver.
Christopher l’accepta avec un « merci » au fort accent britannique avant d’en prélever une bouchée.

— Délicieux,
dit-il levant le pouce.

Chris mâchait lentement, un sourire satisfait aux lèvres.
Il n’aimait pas les hot dogs, les piments lui brûlaient l’intérieur de la bouche, mais peu importait.
Sasha paraissait heureuse, le vendeur semblait un honnête homme qui faisait de son mieux, alors il n’allait pas gâcher ce moment.

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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptySam 14 Juil - 22:25

Ce mec donne vraiment envie de lui causer. Ou alors c’est juste moi qui déraille hein, c’est pas totalement impossible. Mais je sais pas, y a un truc chez lui qui donne envie de se confier donc. C’est ptet un psy. Ou un prêtre. Truc du genre. Enfin, pour le prêtre j’aurais comme un doute. Sauf s’il a perdu sa foi en Dieu, ça pourrait marcher aussi remarquez. Et quand il reprend la parole, je penche la tête sur le côté, curieuse. « Un habitué de la noirceur de l’âme ? Je me suis demandé si vous étiez psy l’espace d’un instant, ça pourrait presque coller en fait. Enfin… ouvrir les yeux c’est bien, mais quand on sait pas quoi faire de cette révélation sur l’atrocité du monde, c’est pas terrible. »

Je laisse filer un silence songeur, sans vraiment répondre à sa question sur le vaccin. Autant qu’il s’imagine ce qu’il veut plutôt que la réalité. J’ai pourtant une ombre de sourire alors que je reprends, le regard un peu perdu dans le vide. « Y a un truc que je pige pas. Comment les gens peuvent être si… différents ? Comment il peut y avoir le pire et le meilleur qui se côtoient, sans que ça choque personne. On dirait que c’est normal qu’un mec essaie de vous braquer et de vous violer au bout d’une rue alors que juste avant on vous a filé 200 dollars et un coin sûr où crécher. Je sais pas moi, y a un truc que j’arrive quand même pas à piger. » Je secoue la tête, comme pour me remettre les idées en place, alors qu’il me parle d’Hannah Arendt donc. C’est intéressant et je sors un petit carnet de mon blouson pour noter son nom avec application. Ouais, j’ai une écriture digne de gamine de 12 ans mais je m’en moque. Déjà, je sais écrire, je dois m’estimer heureuse j’imagine. « J’aime bien avoir des matières à réflexion. Je me sens un peu moins bête après et ça me donne l’impression que si je peux encore évoluer, je dois pas être la seule dans ce cas-là. »

Je sais, ça doit être un peu naïf de penser comme ça mais, si je me laisse totalement envahir par la peur et par tout ce qui va pas, je vais rester enfermée pour toujours dans mon studio et ça risque de devenir un peu glauque. Enfin, encore plus que ça l’est déjà quoi. J’ai un rire au reste de ses propos. « Je vous aime bien vous quand vous dites que j’ai raison. Je peux vous enregistrer pour l’avoir en sonnerie de téléphone ? Ca me ferait du bien à mon égo je suis sûre. Mais se goinfrer c’est un bon plan, ça me va. » Je lui décoche mon plus beau sourire alors que je fais les yeux ronds devant cet énorme hot-dog. Si j’avais su que ma journée tournerait comme ça, j’avoue que j’aurais été un peu plus rapide à aller me jeter la tête la première dans une église. Comme quoi, les voies du Seigneur, tout ça tout ça. J’ai quand même un regard en coin en direction du cuistot, les lèvres barbouillées de moutarde alors que je plisse les yeux quelques instants, reportant mon attention sur mon sauveur de la journée. « Ouais, c’est super bon. Mais c’est pas trop votre genre de bouffe en temps normal hein… trop riche en… c’est quoi déjà ? Acides gras saturés de je sais pas quoi ? » J’attrape un piment qui déborde et je croque dedans avant de froncer le nez de plaisir. « C’est cool en tout cas. Vous êtes cool. Et vous avez sauvé ma journée un peu. » A défaut d’aller vraiment mieux, d’être guérie, au moins, le plus difficile est passé. Plus ou moins. Je sais qu’elle est toujours là, tapie dans l’ombre, prête à revenir quand je m’y attends pas. Mais la migraine me laisse un peu de répit pour le moment, alors je suppose que je dois pas en attendre plus.
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MessageSujet: Re: [Livre I - Terminé] Vade retro migrainas    [Livre I - Terminé]  Vade retro migrainas EmptyMar 17 Juil - 19:47

Christopher se fendit d’un léger rire lorsque Sasha le compara à un psy. Si elle savait… sans doute n’auraient-ils pas cette agréable conversation. Les gens ne parlent pas aux policiers, comme s’ils craignaient que leurs secrets les plus embarrassants se dévoilassent au grand jour par le biais d’une sorte de pouvoir médiumnique. Lorsqu’une personne se confie à un flic, c’est qu’elle en a besoin pour se tirer d’un mauvais pas, généralement dans l’urgence, pas quand elle en a envie.
Les réflexions de Sasha sur la nature humaine touchaient particulièrement le policier, au point qu’il devait contrôler sa voix pour en masquer l’émotion. Christopher se posait régulièrement les mêmes questions depuis toujours et sa quête de réponses n’avait jamais réellement cessé. Chercher à comprendre l’incompréhensible, d’une certaine façon, donnait un sens à son action.

— Puisque le pire et le meilleur se côtoient en chaque être humain, il me parait logique qu’il s’exprime à des degrés divers selon les personnes. D’ailleurs, je ne crois pas que les gens soient indifférents au mal et à l’injustice – hormis les psychopathes et malades mentaux. Je dirais plutôt que les gens sont résignés, fatalistes. Malheureusement, comme disait le prix Nobel de la paix Desmond Tutu : « Si vous êtes neutre dans les situations d’injustice, vous avez choisi le camp de l’agresseur. » Si chacun, à son niveau, essayait de se montrer plus bienveillant et charitable envers son prochain, de s’opposer ou simplement dénoncer les comportements délétères, notre société entrerait dans un cercle vertueux. Enfin… l’espèce humaine a quand même progressé depuis l’âge des cavernes !

Christopher observa Sasha griffonner des notes sur son petit carnet avec une grande satisfaction. Les traits de l’Anglais étaient détendus, plus encore qu’en écoutant les sermons parfois (souvent) ennuyeux du pasteur. C’était lui qui répondait aux interrogations de Sasha plutôt que l’inverse, pourtant l’esprit vif et curieux de la rescapée de guerre lui apportait une belle éclaircie dans son existence morne, sordide et brutale.
D’ailleurs, ses chevilles de sportif faillirent amener ses chaussettes au point de rupture (modèle pourtant enrichi d’élastomère dernier cri) lorsque l’espiègle serveuse proposa d’utiliser ses paroles chargées de compliments en sonnerie de téléphone. Passer devant Justin Bieber et Beyoncé avait de quoi en flatter plus d’un (détrôner le triste bip-bip-bip par défaut, en revanche…).
Malheureusement, l’appel du ventre de Sasha fit rapidement passer les rêves de gloire du lieutenant Hart à la postérité. Pour atteindre la célébrité, diffuser des vidéos de chats sur EuroTube (ou vendre des hot dogs) était quand même plus efficace que poser ses fesses sur le banc d’une église et engager la conversation avec une inconnue.
Bon perdant, Christopher accepta son échec avec le sourire.

La jeune femme maigrelette s’empiffrait deux fois plus vite que son convive moins enthousiaste. Son esprit perspicace lui souffla que le chien en chaleur ne figurait sans doute pas au menu habituel du paroissien.
À la grimace qui étira les traits de Christopher au moment où Sasha croquait dans un piment comme s’il s’agissait d’un petit beurre, on devinait que les épices et condiments non plus. L’Anglais était plus doux avec sa bouche et son estomac qu’avec ses poings.

— Bien vu ! Mais je préfère autant avaler de la nourriture saturée de cochonneries en bonne compagnie, plutôt qu’un plat diététique en compagnie de cochons.

Christopher lança un clin d’œil mi-taquin mi-compatissant à Sasha. Avec son job de serveuse, elle devait en voir des cochons. Des porcs généreux en cochoncetés (parfois salaces) qui avalaient des cochonneries avec la même propreté que bébé sur sa chaise haute.
L’horreur au quotidien. Pas étonnant qu’elle appréciait cette matinée paisible.

Le respect et la sympathie de Christopher envers Sasha étaient sincères, dépourvus d’arrière-pensées. Le visage éclairé et le sourire éclatant qu’il adressait à la jeune femme reflétaient ses sentiments.

— Je vous remercie, Sasha. Ça m’a fait vraiment plaisir de vous rencontrer. On croise rarement des personnes aussi cool que vous à l’église. J’espère que vos problèmes de santé s’arrangeront. (Christopher se tapota le crâne du doigt.) Vous avez peut-être des migraines, mais votre tête fonctionne très bien, beaucoup mieux que maintes personnes éduquées. Ne vous sous-estimez surtout pas ; vous méritez une belle vie, et pas seulement à cause de votre douloureux passé.
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