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 Andranya | Blackout
Anastasia Chostakovitch
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MessageSujet: Andranya | Blackout   Andranya | Blackout EmptySam 25 Mai - 12:31

Blackout

Il fait froid, dehors... pourquoi est-ce que je suis sortie pieds nus ? Mes orteils heurtent les flaques d'une eau qui croupie là depuis des jours mais je continue à avancer résolument. Il fait froid, bon sang qu'il fait froid... mes mains viennent se plaquer contre mes bras nus, tentent de les réchauffer, et je baisse les yeux sur ma tenue. Un simple pantalon en coton et un débardeur. Je suis sortie en pyjama. Ça n'a aucun sens... mais j'avance. Je titube, l'air hagard, suis un chemin que mon cerveau embrumé peine à analyse mais que mes pieds transit de froid semblent connaître par cœur. Qu'est-ce que je fais là ? Mon regard vide se fixe, l'espace d'un instant, sur la vitrine d'un kiosque à journaux. 7 avril 2050... c'est impossible... on ne peut pas être en 2050. Soudain, une goutte tombe sur mon crâne, suivie d'une deuxième, d'une troisième, et une véritable saucée me tombe dessus. Le tissu blanc de mon débardeur vient se coller à ma peau, faisant apparaître les tatouage qui la marbre, et les rafales de vent raidissent chacun de mes muscles jusqu'à rendre la marche douloureuse. Mais je continue, j'avance. Parce qu'il le faut. Il faut que j'avance, il faut que je le trouve, il faut que j'obtienne des réponses. Je cherche encore des repères qui n'existent plus, ne reconnais ni les noms des rues, ni les monuments que je croise. Je ne sais pas où je suis. Je ne me souviens de rien. Et j'ai froid, tellement froid... je suis seule et perdue, qu'est-ce qui m'arrive ? La pluie redouble d'intensité, mes lèvres bleuissent à vue d'œil mais que veux-tu... j'avance. Je dois te trouver. J'ai besoin de toi, j'ai besoin que tu m'aides, j'ai besoin que tu m'expliques.

Au loin, un coup de tonnerre retentit, dans un bruit semblable à celui d'un coup de feu à l'intention exponentielle. Instinctivement, mes mains se plaquent contre mes oreilles et je laisse échapper un couinement terrorisé. Je me recroqueville dans une allée, tétanisée, les yeux roulant dans leurs orbites comme ceux d'une folle. L'écho du tonnerre s'efface et la douleur arrive, cuisante, lancinante, je porte la main à mon flanc trempé de pluie et là, sous mes yeux, l'eau se pare d'un rouge carmin qui me fait paniquer plus encore : du sang. Je saigne... pourquoi est-ce que je saigne ?

Alors je me relève, le cœur au bord des lèvres et une peur telle que je pourrais en vomir mes tripes. Qu'est-ce que fous là, bon sang ? Une main plaquée contre mon flanc ensanglanté et douloureux, je reprends ma route, guidée comme jamais par un instinct que je pensais depuis longtemps éteins. Il faut que je te trouve, que je te vois, que je te parle. Mais un second coup de tonnerre retentit et m'écroule au sol, terrassée par une intense douleur dans le genou droit. Je me mords la lèvre, des larmes de souffrance se mêlent aux gouttes de pluie mais je refuse de hurler pour autant. Personne ne m'a encore repérée, je dois rester à couvert. Mais à couvert de quoi ? Je n'en sais rien... mais il faut que je me relève, que je reprenne ma route et... mon genou est couvert de sang, la rotule a éclaté sous l'impact de la balle et j'ai bien du mal à tenir encore debout. Mais je reprends ma route, j'avance, parce que je dois te trouver.

Je boîte, tente de stopper l'hémorragie de mon flanc et ignore l'insupportable douleur de mon genou. Les éclats d'os se mêlent aux chairs réduites en bouillie, le tibia vient percuter le fémur dans un mouvement tout sauf naturel et bientôt, je n'ai plus d'autre choix que d'avancer en sautillant. Plus vite, plus vite... dès que l'adrénaline ne fera plus effet, je m'écroulerai et ne pourrai plus faire le moindre mouvement. Je dois te trouve, je dois te trouver... mes pas me mènent à un imposant immeuble, le genre d'endroits où on n'a pas eu l'habitude d'aller, le genre de coin fréquenté uniquement par la haute, les lieux que tu détestes parce qu'ils sont envahis d'hypocrites et de gens bien plus chanceux que nous. T'as toujours méprisé ces cons-là, t'as toujours fait que jouer la comédie pour te mêler à eux... parce que oui, c'était un jeu. Mais maintenant, tu vis là ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Pourquoi est-ce que je ne me souviens de rien ?

J'avance, je titube, pose une main couverte de sang sur l'interphone et y pianote un code sans avoir le moindre souvenir de l'avoir appris un jour. La grille s'ouvre, puis je pénètre dans l'immeuble. Mes pieds échouent sur une moquette tiède et moelleuse, la pluie cesse... mais j'ai toujours aussi mal et je tremble, le corps tout entier couvert d'une eau sale et glacée. L'escalier... je dois trouver l'escalier. D'interminables minutes me séparent de toi mais je commence à gravir les marches une à une, animée par une seule idée : je touche au but. Dans le couleur, je délaisse les numéros paires pour m'arrêter devant l'appartement 213. Ton appartement. J'appuie avec insistance sur la sonnette, y enfonce mon doigt pour laisser le son strident te réveiller, t'agacer, te mettre en colère, suffisamment en tout cas pour que tu te sentes obligé de venir m'ouvrir. Et lorsque la porte s'ouvre à la volée, je te vois enfin.

« J'ai... j'ai mal, Andreï... pourquoi... pourquoi est-ce qu'il fait si noir, ici ? »

Mes yeux vides de toute expression cherchent les tiens sans les trouver. Ma jambe abîmée forme un angle inquiétant et la tâche de sang à mon flanc ne cesse de colorer de rouge un débardeur déjà bien trempé.

« Je suis... si seule... j'ai... j'ai froid, Andreï... si seule... j'ai mal... il fait tout noir... »

Et les larmes roulent sur mes joues, des larmes de colère, de rage, d'impuissance, des larmes qui trahissent une intense détresse : celle d'avoir le sentiment d'être en train de mourir.

« J'ai si mal... pourquoi... POURQUOI TU M'AS FAIT ÇA ? »

Le hurlement répond à un énième coup de tonnerre à l'extérieur. La colère prend le dessus, la haine se réveille et je m'avance dans une démarche qui n'a rien de naturel. On dirait un zombie.

« Tu m'as tuée... pourquoi tu m'as tuée ? Pourquoi tu... pourquoi tu m'as dit que tu m'aimais ? »

La souffrance me vrille les sens, je me sens peu à peu partir mais il faut que je sache, il faut que je comprenne...

« Aide-moi... »

J'avance un peu plus mais c'est à cet instant que la lumière s'allume et vient m'éblouir. Tout s'estompe, tout s'efface et... bordel de merde, qu'est-ce que je fais là ?

« Qu'est-ce que... pourquoi est-ce que je suis trempée... ? Lindberg ? Qu'est-ce que... »

Je suis en pyjama, je suis trempée, je suis chez Mikkel Lindberg et je n'ai aucun souvenir d'être venue ici. Il doit être 4h du matin, c'est insensé... bon sang... qu'est-ce que c'est que cette merde ? Je suis frigorifiée... réfléchis, Anya, réfléchis... la seule hypothèse qui me vient, c'est que je suis somnambule. Tétanisée par le froid, j'en oublie la peur dévorante qui m'a saisie quelques minutes plus tôt, et tandis que je m'inspecte pour voir si je ne me suis pas blessée, il y a une chose que je ne peux pas constater mais qui est évidente : je n'ai rien. Ce sont les douleurs fantômes qui ont parlé, qui ont simulé ces balles nichées dans mon corps. Je vais bien, à l'exception d'une forte hypothermie et d'une incompréhension totale.

« Qu'est-ce que je fais ici ? Pourquoi... ? »

Pourquoi est-ce qu'il a l'air d'avoir vu un fantôme ? Et pourquoi j'ai traversé la moitié de la ville pour me retrouver chez lui ?
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Andreï S. Rostov
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MessageSujet: Re: Andranya | Blackout   Andranya | Blackout EmptyLun 27 Mai - 19:07

Blackout

Je n’arrive pas à dormir. Depuis cette affaire avec Samuel Smith, je suis obligé de crécher bien plus souvent qu’avant dans son appartement. Maintenant qu’il est entré dans le viseur des flics, il n’a pas vraiment le droit aux faux pas, il a même plutôt intérêt à avoir une existence en béton armé. C’est du moins ce qu’ont conseillé nos connards d’avocat. Connerie, que de m’envoyer faire le pingouin encore plus souvent que d’habitude. Connerie, connerie et connerie encore. Surtout que plus ça va, plus les foutus jours se suivent, plus son visage m’obsède et me hante. Ils ont refait le mobilier, réparé la serrure, nettoyer les traces de sang qui traînaient sur le sol et le tapis, ils ont réparé la table basse, la télé, changé le canapé, ils ont tous passé aux produits ménagers mais je sais pas, son odeur persiste, sa respiration persiste, son existence persiste, comme une foutue tâche rémanente dans ma pupille. J’ai pas regardé le soleil droit dans les yeux mais c’est tout comme : elle a agressé ma rétine pour s’imposer ; et j’arrive pas à dormir. Sans compter Hermès qui me tient la jambe avec cette affaire, encore une affaire, comme si j’en étais le responsable.

J’arrive pas à dormir. Et je n’ai même pas de sac de frappe, Mikkel est bien trop respectable pour ça, bien trop aseptisé pour ça, bien trop inintéressant et invisible pour ça, hein. Même pas de quoi me défouler, des réserves d’alcool qui sont surveillées puisqu’il faut renflouer les stocks régulièrement, et je tourne comme un fauve en cage dès que la nuit tombe parce que Mikkel n’irait jamais se saouler dans un bar, voyons. Il doit se tenir à disposition si jamais les flics décidaient à nouveau de lui tomber dessus le matin, voyons. Connerie. Putaiiin. Je n’arrive pas à dormir. Même dans mon plumard, je pense à elle, vu que mon esprit est suffisamment con pour s’imaginer capable de continuer à sentir son odeur ici aussi. Elle hante toutes les pièces de l’appartement, je dors sur le canapé comme un couillon, je zone devant la télévision allumée, les yeux rivés sur mon téléphone, la nervosité au bout des doigts d’envie de frapper quelqu’un, d’interroger quelqu’un, de me rendre utile. Juste me rendre utile et m’occuper l’esprit pour arrêter de penser à elle. Comme si c’était possible.

J’arrive pas à dormir. D’un mouvement brusque, je rejette la couverture que je me suis jeté dessus, je m’étire, je dérive vers la cuisine, le frigo, me trouve une bière à décapsuler et un ordi à allumer pour bosser, histoire de. Bosser… faire quelque chose de constructif. Mais quoi ? Je me cale sur le canapé, pose mes jambes sur la table basse, cale le portable sur mes cuisses et déverrouille ma session pour trouver ouvertes une demi-douzaine de rapport qu’ils m’ont envoyé, et les enregistrements qui y sont associés. Georg a été clair : dès lors que les communications sont sécurisées, on me fout des enregistrements audio, histoire que je ne m’énerve pas à essayer de relire des conneries. Je branche mes écouteurs, lance le premier fichier. Ferme les yeux. Avec un peu de chance, ce sera suffisamment chiant pour que ça m’endorme. Avec un peu moins de chance, je vais réussir à me concentrer suffisamment sur la voix et pas les bruits en arrière-plan et intégrer deux trois données, histoire d’entretenir mon utilité, histoire de ne pas faire encore plus défaut à Georg. Histoire de continuer à…

La sonnerie me prend au dépourvu, je sursaute comme un con, verrouille le PC et arrache les écouteurs de mes oreilles, pose une main sur le flingue qui ne me quitte jamais. Il ne s’est pas passé plus de quelques battements de cœur. Il est quelle heure ? Une heure pire que tardive. Comment est-ce qu’on a pu me prendre par surprise comme ça ? Parce que j’étais distrait. Comment… Le bruit de la pluie masque un peu les sons extérieurs, couvre de justesse sa respiration. Nouvelle sonnerie. Qui me vrille les tympans et me flingue le cerveau par sa hauteur, son grésillement impur et… C’est bon, j’arrive ! je crache, en retenant un énième putain qui n’est pas supposé convenir à Mikkel. Ce connard de Mikkel. Je repousse l’ordi sur la table basse, tente de réfléchir, d’analyser, de comprendre, le temps de rejoindre la porte d’entrée de l’appartement que j’ouvre d’un mouvement brusque.

Et je me fige. « J'ai... j'ai mal, Andreï... pourquoi... pourquoi est-ce qu'il fait si noir, ici ? » Andreï Je reste immobile. Incapable de faire le moindre geste. Elle est trempée ; rien d’étonnant vu la pluie. Elle est en… pyjama ? Vu l’heure… mais… Elle a dans les yeux une absence des plus complètes, et c’est ça qui me terrifie le plus. J’ai les doigts qui veulent aller chercher mon flingue, qui a trouvé sa place habituelle dans mon dos, à portée de main mais invisible de face. Je les retiens. Je ne bouge pas. Je ne respire même pas. Parce que je ne comprends pas. Quelque part, je sais que je suis au mieux supposer jouer l’indifférence et l’incompréhension distantes. Au pire, la violence et une balle entre les deux yeux. Mais je ne fais rien. Parce que je suis incapable de faire quoique ce soit. « Je suis... si seule... j'ai... j'ai froid, Andreï... si seule... j'ai mal... il fait tout noir... » A l’incompréhension succède sans plus tarder la panique. L’envie, brûlante, de la prendre dans mes bras. Sauf que je ne bouge toujours pas, je ne me décale pas, je ne recule pas, je n’avance pas. C’est même de justesse que j’arrive à souffler Anastasia… .

« J'ai si mal... pourquoi... POURQUOI TU M'AS FAIT ÇA ? » Au même moment, un coup de tonnerre ; l’électricité dans l’air, que je dois imaginer, me hérisse les poils au même titre que son hurlement. Et à son pas en avant, à la haine dans ses yeux, dans ses gestes, dans sa voix, je recule brutalement. Elle entre dans l’appart’. La porte se referme derrière elle. Mes doigts se décrispent et récupèrent mon flingue. Elle mentait. La dernière fois, elle mentait. Elle jouait vraiment la comédie, elle m’a berné comme elle ne m’a jamais berné, elle m’a trahi une seconde fois. La sécurité saute. Tu m’as menti. Tu te souviens de tout Voix brisée. Nouvelle trahison dans les veines. Elle me hait et elle a tellement changé qu’elle en est devenue inhumaine. Tu m’as laissé tomber que je souffle. Avant de crier, en la mettant en joue. TU M’AS LAISSE TOMBER ! Mon cri se noie dans un nouveau coup de tonnerre, les éclairs viennent fragmenter la scène en ne nous éclairant que par flash, je me rends à peine compte que je n’avais pas allumé la lumière, la faible luminosité suffisant à mes yeux jusque-là. Pluie. Elle n’est qu’une silhouette. Eclair, Anya se dresse devant moi, lourde et agressive de reproches. « Tu m'as tuée... pourquoi tu m'as tuée ? Pourquoi tu... pourquoi tu m'as dit que tu m'aimais ? » Tu m’aimais. Elle se souvient de tout. D’absolument tout.

Y compris de ça. Et pour la troisième fois, je remets la sécurité de mon flingue et mon bras vacille. Nouvel éclair ; mes doigts sont à deux doigts de lâcher mon arme. Nouveau coup de tonnerre. Elle me poignarde sans avoir besoin de brandir une quelconque arme. « Aide-moi... » Elle enfonce lentement une lame de trois petites syllabes dans mon cœur. Bien sûr je souffle, parce que je ne peux rien souffler d’autre. Parce que je la hais – ce n’est même pas négociable – mais que je répondrai toujours présent quand elle aura besoin d’aide. D’aide pour quoi ? J’en sais rien et je n’en ai strictement rien à foutre. Bien sûr que je veux t’aider, Anya. Bien sûr que je t’aiderai toujours. Je te hais, je veux te tuer, les choses seraient bien plus simples si je te tuer maintenant, mais il suffit que tu me demandes ton aide pour que je te l’offre, sans arrière-pensée, parce que je suis incapable de prendre le moindre recul dans ce genre de situation. Je tends les bras vers elle pour l’enlacer, je me retiens de justesse, cherche à noyer mon geste en me défilant, en la contournant pour verrouiller correctement la porte et allumer la lumière.

Grossière erreur. La pièce s’illumine, me pousse à plisser les yeux sous l’agression violente, le temps que je m’adapte au changement brutal, je dois faire face à un autre revirement. « Qu'est-ce que... pourquoi est-ce que je suis trempée... ? Lindberg ? Qu'est-ce que... » Elle a disparu. Quand je me retourne pour lui faire face, m’appuyer contre la porte, il me suffit d’un coup d’œil pour me rendre compte qu’elle… a changé. Jour et nuit. « Qu'est-ce que je fais ici ? Pourquoi... ? » Je pâlis. Dans sa voix, dans ses yeux, dans son attitude, jusque dans les battements de son cœur, je sens la métamorphose. Mais pourquoi as-tu pressé l’interrupteur, couillon ? Je veux reculer, la porte m’enfonce sa poignée dans le bas du dos, me fait comprendre qu’il en est hors de question. Pourquoi ? je répète. En écho. Je ne me contente pas de répéter d’ailleurs : c’est une véritable question que je lui pose. Pourquoi est-elle venue ici ? Pourquoi ce jeu, pourquoi faire semblant de ne plus me connaître, pour me confronter ensuite à mes décisions, au meurtre que j’ai commis il y a cinq ans ? Pourquoi me torturer comme ça, pourquoi me provoquer comme ça ? J’en sais rien de ce que tu fais là, Anya Je perds mes moyens. Tu te pointes chez moi sans crier gare, tu es trempée, tu as dû venir à pied, tu…

Il faudrait que je la dégage de là. Il faudrait que je la tue. Il faudrait que je m’en occupe, d’une façon ou d’une autre. Au lieu de quoi… je perds mes moyens. Est-ce que ça va ? Au lieu de quoi, je m’inquiète. J’angoisse. Je ne sais pas quoi faire, je ne sais plus quoi faire. Si Georg me fait surveiller, elle est morte et je suis mort. Si Georg débarque sans prévenir, elle est morte et je suis mort. Pourquoi tu fais ça ? Pourquoi tu me fais ça ? Pourquoi tu t’es pas barrée de l’autre côté de la planète ? Pourquoi est-ce qu’elle m’impose ça ? Pourquoi tu m’as trahi, en premier lieu ? Pourquoi, pourquoi… c’est à moi de poser cette question, pas à elle. Moi, je me suis contenté d’obéir. D’être celui qu’on attendait que je sois. Qu’est-ce que tu fous là, pourquoi est-ce que tu fais semblant de ne pas me connaître ? Parce que tu mentais, hein ? Ce n’est plus la peine de te foutre de ma gueule, tu viens de m’appeler par mon prénom. Tu te souviens d’Andreï. Elle me mentait, la dernière fois, quand elle me parlait d’amnésie.

Et je n’explique toujours pas comment elle a pu me mentir sans que je ne le sache.



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Anastasia Chostakovitch
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MessageSujet: Re: Andranya | Blackout   Andranya | Blackout EmptyLun 27 Mai - 20:24

Blackout

Le réveil est brutal. La lumière m'arrache à ma torpeur avec une violence telle que lorsque je reprends mes esprits, j'ai le souffle coupé et les jambes qui tremblent. L'eau qui ruisselle de mes cheveux va s'écraser au sol, mes pieds couverts d'encre sont aussi salis par de la suie, de la terre et... du sang ? J'ai dû me couper ou m'érafler la peau en marchant. En jetant un regard à mes doigts tremblants, je remarque qu'ils sont violacés par le froid et me doute que mes lèvres doivent avoir à peu près la même allure. Bon sang... et ces foutus tremblements... est-ce le froid ou l'état de choc ? Je n'en sais rien que je suis frigorifiée et incapable de bouger. Le tissu détrempé de mes vêtements me colle à la peau, faisant apparaître par transparence les tatouages qui la parsèment. Contre mon sternum, niché sous mon cœur, le rat tracé à la façon d'une calligraphie chinoise semble fantomatique et par réflexe, mes doigts ankylosés viennent saisir le pendentif qui ne quitte jamais ma gorge. Ce geste-là, instinctif, me rassure toujours, lorsque quelque chose ne va pas. Et merde... qu'est-ce que je fous là ? Mon regard croise celui de Lindberg. Il a l'air aussi paumé que moi et même inquiet. Fais chier, qu'est-ce que j'ai bien pu lui raconter ? J'ai beau me triturer la cervelle, mon dernier souvenir remonte à plusieurs heures, lorsque je me suis mise au lit. Comme toujours, impossible de m'endormir facilement, tant je me suis acharnée à me répéter les souvenirs de la journée pour ne pas les oublier. Je sais simplement que je me suis endormie sur une question : pourquoi Mikkel Lindberg me semble-t-il si familier ? Faut croire que la question m'a obsédée suffisamment pour que je me pointe chez lui après avoir marché sous la pluie. Déjà qu'il m'a prise pour une folle la dernière fois, là il va carrément prévenir l'hôpital psy... Mes yeux dérivent de son visage vers ses mains et un frisson me parcoure l'échine en découvrant le revolver à sa main. A-t-il seulement l'habitude d'accueillir les gens comme ça ? Ou me suis-je montrée menaçante et agressive ? Bon sang... je n'arrive pas à me rappeler être venue ici, tout comme je suis incapable de me rappeler de ce que j'ai pu lui dire en arrivant ici. C'est comme si... comme si j'avais été endormie tout ce temps et que quelqu'un en avait profité pour prendre le contrôle de mon corps. Ce n'est pas la première fois que je suis somnambule. Mais à chaque fois, je me retrouve dans une autre pièce ou avec un objet qui n'a rien à faire là dans la main. Là, ça dépasse l'entendement. J'ai envie d'appeler Matthew, de lui demander ce qu'il en pense, de le supplier de venir me chercher car à cet instant, il est bien le seul en qui j'ai confiance. Seulement, je n'ai pas de téléphone et je ne suis pas certaine que Lindberg soit disposé à me prêter le sien sans un minimum d'explications. S'il savait que celle qu'il a connu, celle qui est enfouie en moi, est venue là parce qu'elle est pétrie de reproches, de colère, de rancœur... mais aussi parce qu'il est le seul avec qui elle se sente en sécurité... et puis voilà qu'il se remet à me tutoyer, comme s'il me connaissait bien.

« Je... je suis désolée, je ne voulais pas, je n'ai pas... je ne sais pas ce qu'il s'est passé. »

La peur est là, palpable, je porte sûrement sur moi l'odeur nauséabonde de l'angoisse, mon cœur s'emballe dans ma poitrine et s'il me croit menteuse, c'est qu'il surestime mes compétences d'actrice. Et finalement, il me demande comment ça va. L'espace d'un instant, je le dévisage, le trouve soudain prévenant et mon cœur ralentit sensiblement. Est-ce que je vais bien ? Je baisse les yeux sur ma pitoyable carcasse. J'ai les mains sales, une blessure au pied qui saigne, un genou écorché, aussi, mais non, je n'ai rien. Du moins rien de grave, c'est certain.

« Je... oui, enfin je crois. J'ai juste quelques égratignures... »

Et j'ai froid, bon sang que j'ai froid. Les bras enserrant ma poitrine, je grelotte et contiens du mieux que je peux les claquements incessants de mes dents. Hypothermie, me hurle mon instinct, que je connu d'ignorer. Et puis voilà que Lindberg s'énerve, qu'il recommence à se comporter comme si nous nous connaissions depuis des années... et les flashs reprennent. Pourquoi tu me fais ça ? Nouveau flash, son sosie du passé me hurle les mêmes mots en écho. Pourquoi tu m'as trahi ? Une nouvelle douleur me perfore l'abdomen, ses yeux me transpercent et à nouveau, je peine à différencier le cauchemar de la réalité. Je plaque mes mains contre mes oreilles, recule en chancelant et m'effondre à terre. Je me recroqueville contre le bar, mes yeux me brûlent mais aucune larme ne franchi le rempart de mes paupières, je m'y refuse. Les mains toujours plaquées contre les oreilles, j'ai envie d'ignorer ce qu'il me raconte. J'ai froid, le crâne au bord de l'explosion, je ne me souviens de rien... bon sang, que tout ça s'arrête, par pitié !

« Je ne me souviens pas ! »

Mon hurlement s'est transformé en un ridicule glapissement. Lorsque je relève les yeux vers Lindberg, je me sens pitoyable mais mon regard est déterminé.

« Bon sang mais qu'est-ce que je vous ai fait pour que vous m'en vouliez à ce point ? Depuis cinq ans, j'ai des flashs, des bribes de souvenirs et oui, Andreï est le nom qui revient le plus souvent dans ces souvenirs. Alors si je suis une menteuse, vous êtes quoi, vous ? Si Andreï est réellement votre prénom, j'aimerais bien savoir qui est Mikkel Lindberg. »

Percluse de douleur, je me relève en grimaçant et viens lui faire face. C'est drôle, nous faisons pratiquement la même taille et mes yeux trouvent les siens avec cet air de défiance comme s'ils avaient l'habitude de le faire. Je me rends alors compte que c'est l'adrénaline qui me tient debout et que si je ne veux pas faire une seconde syncope sur son parquet il faut que je continue à l'alimenter. Je porte les mains à ma nuque, frissonne en sentant mes doigts glacés effleurer ma peau et décroche ce pendentif qui, habituellement, ne me quitte jamais, et le tends à Lindberg – ou peu importe qui il est.

« Alors dis-moi, Andreï... toi qui semble si bien la connaître, qui est Anya ? Ce nom et ce pendentif, c'est tout ce qu'il me reste, tu comprends ? »

Je fais un pas vers lui, lui fourre le bijou dans la paume et pointe le rat qui se dessine toujours sous le tissu de mon t-shirt.

« Dis-moi qui je suis, Andreï. Dis-moi pourquoi je tiens plus à ce collier qu'à ma misérable vie, dis-moi pourquoi c'est à ton nom que je pense quand je vois ce rat tatoué au milieu de tous les autres, dis-moi ce qu'il s'est passé pour que j'en sois là. »

Il est le premier à avoir prétendu me connaître. Qu'il ne me fasse pas croire maintenant qu'il disait ça au hasard sinon je le jure devant qui veut m'entendre que je l'étripe.

« Dis-moi qui je suis et je répondrai à tes questions. Parce que tu me parles d'abandon, de trahison, mais si je ne me souviens de rien, je ne peux pas m'excuser ou t'envoyer chier. »

Qu'il ne compte pas sur moi pour faire semblant de me souvenir. S'il veut des réponses, il faudra qu'il travaille main dans la main avec moi. Et s'il ne veut pas de ces réponses, alors... je repartirai comme une conne, sans indice ni info.
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Andreï S. Rostov
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MessageSujet: Re: Andranya | Blackout   Andranya | Blackout EmptyLun 27 Mai - 20:25

Blackout

Sous la lumière, mes yeux se plissent, rétines brûlées d’avoir fouillé l’obscurité trop longtemps. Sous la lumière, sa présence jusque-là immatérielle se confirme. Si proche, beaucoup trop proche. Le cœur qui bat dans ma poitrine, qui s’affole, encore et encore. Je veux la frapper. Je veux l’embrasser. Je veux la prendre dans mes bras et lui briser la nuque. Je veux lui faire payer sa trahison, ses trahisons, ses mensonges et ce regard hanté et absent qu’elle pose sur moi, un regard que je ne comprends pas. Un regard qui me donne des envies de meurtre, qui n’est à rien de me briser. Un regard qui me pousse à croire qu’elle est toujours là, celle que je connaissais, celle qui a quelques années pris la place de Georg au centre de mon univers, celle pour qui j’aurais tout fait, tout donné, tout abandonné. Celle pour qui… je me suis perdu. je la déteste, et pourtant je ne peux qu’être présent lorsqu’elle me demande de l’aide. Je la hais et pourtant à chaque fois que je pose les yeux sur elle…

Lindberg ? L’agression de la lumière s’estompe, pour laisser place à une agression plus violente encore. Celle du réveil. Celle du mensonge. Celle de cette tromperie qu’elle entend poursuivre. Elle est incohérence, Anya, elle se joue de moi, elle se fout de ma gueule avec ses hésitations. Elle me met les nerfs à vif, à s’amuser avec moi comme un chat avec une souris. Qu’est-ce qu’elle fait là ? Comme si j’avais la réponse, comme si j’étais capable de deviner ce que son esprit tordu a en tête. Pourquoi ? Mais c’est à moi de poser cette question. C’est à moi d’avoir des réponses. C’est à moi de… Je veux reculer, le mur, la porte m’en empêche. Je veux reculer, je veux mettre le plus de distance entre elle et moi. Mais tout ce que je me retrouve à avoir, en dehors de mon flingue, toujours à ma portée, toujours présent, rassurant, tout ce que je me retrouve à avoir en dehors de lui ce sont des questions. Des mots. Des morts. Entre elle et moi. J’ai le cœur qui bat à toute vitesse. Pourquoi… ? Pourquoi est-ce qu’elle porte encore ce collier après ce qu’elle m’a fait ? Pourquoi est-ce qu’elle… Je me mords la lèvre, les yeux qui dérivent, encore et encore, sur elle. Qui quittent ses yeux pour s’attarder sur le tissu trempé qui dessine ses tatouages. Sur le tissu trempé qui colle à sa peau, qui révèle une grande ourse scintillante, un rat aux contours noirs et marqués… J’ai beau tenter de ramener mon regard sur elle, sur son visage, dans ses prunelles, je ne peux pas m’empêcher de la mater. C’est fort que moi. Tout comme je ne peux pas m’empêcher de m’inquiéter. Et ça ne va pas en s’arrangeant. « Je... je suis désolée, je ne voulais pas, je n'ai pas... je ne sais pas ce qu'il s'est passé. »

Je suis désolée. Douche froide sur ma colère, ma haine est mise au tapis, KO. Ne subsiste que l’inquiétude. Depuis quand est-ce qu’Anastasia s’excuse aussi facilement ? Depuis quand… depuis… La peur est là, dans ma poitrine. Elle tremble, elle se pèle, elle est perdue, je le sens. Mais je sentais aussi sa sincérité la dernière fois. Je croyais la sentir. Alors qu’elle mentait. Je suis perdu, aussi perdu qu’elle semble l’être. Et l’angoisse… n’a jamais rien apporté de bon chez moi. Est-ce qu’elle va bien ? « Je... oui, enfin je crois. J'ai juste quelques égratignures... » Ses yeux se baissent, me guident jusqu’à ses genoux. J’effleure d’immondes cicatrices, les échos des coups de feu résonnent à mes oreilles, ravivent ma colère, le goût amer de la trahison, de l’incompréhension, attise ma fureur engourdie par l’angoisse. Réveillent des questions que j’assène sans la moindre patience. Qu’est-ce qu’elle fout là, pourquoi, pourquoi, surtout pourquoi est-ce qu’elle continue à feindre l’ignorance, pourquoi ce double-jeu, pourquoi ce double-je ? Pourquoi ? ?

Je refuse de la voir reculer, je refuse de me laisser atteindre par ses mains plaquées sur ses oreilles, je refuse de me laisser affaiblir par la détresse qui noie son visage, je refuse de… Elle chancèle. Anya ! J’ai un pas en avant, bien malgré moi. Elle s’effondre, je me fige, à un rien de me précipiter pour la prendre dans mes bras. Tétanisé. Comme quelques jours plus tôt, dans le bureau. Tétanisé. En position de force, mais bien trop vulnérable pour en profiter. « Je ne me souviens pas ! » elle gémit. Tu mens ! je rétorque d’une voix brisée. Elle ment, elle ne peut que mentir. Elle ne fait que mentir. C’est ce que tu sais faire le mieux, c’est ce que tu as toujours su faire de mieux ! Elle ment, elle me ment. Comme elle me mentait quand elle m’embrassait, me tenait la main, me murmurait qu’on partirait ensemble.

Elle relève les yeux vers moi, je me félicite de ne pas être allé au bout de mon geste. Je la surplombe. Avec colère et détresse. Pour les opposer à sa détermination et à sa vulnérabilité. « Bon sang mais qu'est-ce que je vous ai fait pour que vous m'en vouliez à ce point ? Depuis cinq ans, j'ai des flashs, des bribes de souvenirs et oui, Andreï est le nom qui revient le plus souvent dans ces souvenirs. Alors si je suis une menteuse, vous êtes quoi, vous ? Si Andreï est réellement votre prénom, j'aimerais bien savoir qui est Mikkel Lindberg. » Elle se relève, je refuse de l’aider, de lui tendre la moindre main, je refuse de lui concéder un seul geste. J’ai dans les yeux un déchaînement de colère et de détresse. Toujours. Comme si je ne connaissais plus rien d’autre, comme si c’étaient désormais les deux seules émotions à avoir la moindre emprise sur moi. Je ne sais pas quoi répondre. Et quand elle décroche de sa nuque le pendentif que je lui ai offert il y a une éternité, je ne sais plus quoi dire. Elle me le tend. Je le laisse osciller au bout de sa main une ou deux fois avant de l’arracher. « Alors dis-moi, Andreï... toi qui sembles si bien la connaître, qui est Anya ? Ce nom et ce pendentif, c'est tout ce qu'il me reste, tu comprends ? Dis-moi qui je suis, Andreï. Dis-moi pourquoi je tiens plus à ce collier qu'à ma misérable vie, dis-moi pourquoi c'est à ton nom que je pense quand je vois ce rat tatoué au milieu de tous les autres, dis-moi ce qu'il s'est passé pour que j'en sois là. Dis-moi qui je suis et je répondrai à tes questions. Parce que tu me parles d'abandon, de trahison, mais si je ne me souviens de rien, je ne peux pas m'excuser ou t'envoyer chier. » Je referme le poing sur la grande ourse. Refuse de suivre son doigt pour voir à nouveau le rat tatoué dans sa peau, aussi définitivement qu’elle s’est elle-même tatouée en moi. Je referme le poing, à m’en faire mal, à sentir les angles du pendentif s’enfoncer dans ma paume, à souhaiter qu’il la marque à jamais. Dis-moi qui je suis. Une salope J’articule d’une voix pâle. Est-ce qu’elle ne se souvient vraiment plus de rien ? Et une menteuse. Je crache, de plus en plus tendu. Voilà qui tu es, voilà qui est Anya. Une traitre j’aimerais rajouter, mais elle en sait déjà trop sur moi. Et moi, je n’ai toujours pas compris à quoi elle joue, elle. Elle tient à plus à son collier qu’à sa vie ? Va te faire foutre Je lâche, avant de lui tourner le dos, avant de me diriger à pas vif vers ma chambre.

D’un mouvement brusque, je dégage des armoires parfaitement rangées de Lindberg une chemise et un jogging que je lance dans sa direction, sans lâcher un seul instant le pendentif. Habille-toi. Tu te pèles et tu me distrais.  Je rouvre le poing. Je m’appelle Mikkel Lindberg, Andreï est mon deuxième prénom. Sauver les meubles. Le temps de trouver un plan d’attaque, une façon adroite et intelligent de l’inciter à se casser, à ne pas creuser plus loin. A défaut d’être incapable de l’abattre, il faut que je protège les Rats. Il faut que je remette de la distance. Que je l’incite à me lâcher, à se casser, à aller voir de l’autre côté du monde si j’y suis. Le temps de… Tu m’as trahi il y a cinq ans. Tu m’as tourné le dos, tu as jeté dans le caniveau tout ce que tu m’avais promis. Tu veux savoir qui est Anya ? Anya est une putain de connasse égoïste. Elle trahit tous ceux qui ont confiance en elle, et elle leur rit au nez. Tu veux savoir qui tu es ? Tu es une menteuse, une hypocrite. Et moi, je suis que tu as foutu en l’air sans le moindre remord. Voilà qui tu es, voilà qui je suis. Tu ferais mieux de jamais te souvenir de qui tu étais, parce que sinon, la première chose que tu ferais, ce serait de te foutre une balle dans le crâne. Ce serait la meilleure chose à faire.

Rancœur. Dégoût. Colère. Détresse. Tout en parlant, j’ai refermé le poing sur le pendentif. Je ne lui rendrai pas. Elle ne le mérite pas. Maintenant tu sors de cet appartement, et tu sors de ma vie. Avant que je ne craque.

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Anastasia Chostakovitch
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MessageSujet: Re: Andranya | Blackout   Andranya | Blackout EmptyLun 27 Mai - 20:29

Blackout

Mon regard se fait froid et déterminé, lorsqu’il m’assène des questions auxquelles je n’ai pas les réponses. Je ne sais pas qui je suis, comme je suis arrivée là, pourquoi on m’a retrouvée à l’article de la mort il y a cinq ans, pourquoi j’ai perdu la mémoire ni pourquoi j’ai l’irrépressible envie de rester là, près de lui, alors même qu’il m’insulte et me crache des horreurs à la gueule. Y a de sentiment de confiance qui me réchauffe les entrailles et m’empêche de m’effondrer à terre sous l’hypothermie, une confiance aveugle et dévouée envers ce salopard qui continue de me traiter comme une moins que rien. C’est elle, Anya ? Une chiffe molle qui se laisse faire par le premier trou du cul venu ? Jamais de la vie. Je m’y refuse et me relève, lui fourre le collier dans les mains en espérant que ce geste suffise à lui ouvrir les yeux et reste là, avide de réponses. Dis-moi qui je suis, Andreï, dis-moi qui nous sommes… c’est impossible que nous ne nous connaissions pas, pas alors qu’il est si familier avec moi. Tu sais des choses, Andreï. Tu gardes enfouies dans ton crâne les précieuses pépites qui pourraient me permettre de remettre de l’ordre dans ma vie. J’ai envie de t’ouvrir le crâne, d’y farfouiller à la recherche de ces réponses et tant pis si ça doit t’coûter la vie. Tu ferais pareil à ma place, non ? Dis-moi qui je suis…

Une salope.

Le terme me fait sursauter. J’ai attendu des réponses, un nom complet, quelque chose, même un « personne », mais certainement pas ça. Pas ce genre d’insulte. Trop stupéfaite pour répliquer quoi que ce soit, je reste muette, les yeux écarquillés de surprise. Et puis la seconde se pointe, tout aussi violente : une menteuse. Une salope et une menteuse, donc. Les mots viendraient d’un autre, j’en rirais avec indifférence et lui mettrait un poing en plein visage mais lui… c’est lui qui détient les réponses, lui qui sait, lui qui peut m’apporter un semblant de sérénité et même ça, il me le refuse. La stupéfaction se dissipe, la colère prend le dessus et je la sens soudain monter, enfler, écrasant tout sur son passage. Elle commence par engloutir la confiance, met le feu au besoin pathétique de savoir et se répand comme une traînée poudre, alors même qu’il s’éclipse dans sa chambre pour Dieu sait quoi. À quoi bon réfléchir, Anya ? À quoi bon chercher des réponses qu’il refuse de te donner ?

Il ne s’absente pas longtemps, c’est vrai… mais assez pour que je regarde autour de moi, l’air hagard. Les meubles ont été changés, il n’y a plus la moindre trace de bris de verre… comme si rien ne s’était passé. Mon regard glisse vers l’impeccable cuisine ouverte, au carrelage si propre qu’on dirait presque qu’il n’a jamais été utilisé. C’est drôle, quelque part, mon instinct me chuchote à l’oreille que tout ici sonne faux ou plus précisément trop juste. Je ne sais pas pourquoi, mais je m’y sens mal à l’aise. Ou peut-être est-ce dû au fait que toute cette mascarade n’a aucun sens et bordel qu’il fait froid. Mes yeux effleurent le bois du bar, glisse jusqu’à une corbeille de fruits vide, s’attardent sur un assortiment de couteaux de cuisine parfaitement rangés. C’est trop… je ne sais pas, ça ne va pas avec la colère ni la vulgarité du type qui vit ici. D’une façon robotique, mes pas me mènent jusqu’à cette cuisine où j’observe chaque élément, me perds entre réalité et souvenirs qui surgissent sans que je puisse lutter contre. Tout ça, c’est de la faute de Lindberg… je commençais tout juste à me faire à l’idée que jamais plus je ne me souviendrai de mon passé, et voilà qu’il se pointe, cet arrogant salaud au visage d’ange, et qu’il provoque une réaction en chaîne sans commune mesure. Les souvenirs se multiplient, s’éparpillent, m’assaillent et je n’ai plus d’autre choix que de faire avec. L’écho de conversations me percute, des images me frappent, brouillent ma perception de la réalité et lorsqu’il revient dans le séjour en jetant des vêtements sur le dossier du canapé, je me rends compte d’une chose : j’ai tellement déliré pendant ces deux petites minutes que je ne sais même pas comment je suis arrivée près de la fenêtre. Il faut que je me tire d’ici et je mette le plus de distance entre Lindberg et moi. Ce n’est pas celui que je cherche. Ça ne l’a jamais été et lorsque je réalise cela, une boule obstrue ma trachée. J’ai misé trop d’espoirs en lui… ce n’est qu’un enfoiré de plus sur cette putain de planète alors pourquoi suis-je si déçue et triste ? Putain, ça suffit Anya.

Il me donne un ordre, je ne bouge pas. Toujours la même agressivité dans la voix, la même rancœur qui suinte de ses mots, et mes yeux accrochent malgré eux l’éclat du pendentif qu’il tient toujours dans sa main… et cette fois, c’est moi qui vois rouge. A nouveau, la colère enfle, grandit, grossit telle une immonde bête sauvage à la gueule couverte de crocs. Je perds pied mais cette fois, pas de flash, pas d’écho, rien. Seulement l’étrange impression de ne plus maîtriser mon corps. Tu m’as trahi, qu’il me dit, une putain de connasse égoïste, une traitresse… c’est donc bien de ça qu’il s’agit : de trahison. Une menteuse, une hypocrite… y a tellement de ressentiment en lui que je ne peux empêcher un sourire de s’étirer sur mes lèvres : lorsqu’on a autant de colère en soit, autant de haine à l’égard de quelqu’un, c’est que, quelque part, on l’aime plus qu’on ne veut bien l’avouer. Mais ses derniers mots, eux, font rapidement disparaître ce sourire : suicide-toi, c’est à peu de choses près ce qu’il vient de me dire, sans hésiter un seul instant. Peut-on haïr quelqu’un au point de souhaiter qu’il mette fin à ses propres jours ? Peut-on seulement espérer cela sans le regretter un seul instant ? Visiblement oui…

Et s’il avait raison ? Si ça mettait fin à tout ? Suis-je pathétique au point d’accorder du crédit à ce qu’il vient de dire ? Bon sang… je me sens tellement ridicule… je devrais peut-être ouvrir la fenêtre et sauter du balcon, ça le dériderait peut-être pendant dix secondes ? Je me décolle alors de la fenêtre, fais un pas chancelant vers lui, les yeux rivés sur le sol.

« Tu as sûrement raison… qui se soucie d’une amnésique, hein ? Et si je t’ai trahi, c’est légitime que tu m’en veuilles… je peux bien achever l’œuvre de celui qui m’a laissée pour morte il y a cinq ans… »

Tout dans ma voix sonne comme la complainte d’une héroïne de tragédie qui s’apprêterait à accueillir la mort pour jouer au bridge avec elle. Si je n’étais pas moi, je croirais à ce que je viens de dire, à cette résolution face à la mort… mais je ne suis plus vraiment moi, n’est-ce pas ? Après tout, c’est de la faut d’Andreï ou de Lindberg, qu’importe son nom, c’est lui qui a ravivé quelques-uns de mes souvenirs. Les yeux toujours rivés au sol, je m’avance toujours vers le canapé et frissonne en sentant quelque chose de froid contre mon bras. Sûrement l’eau qui continue à goutter de mes cheveux détrempés.

« Rend-moi mon collier. »

Et, alors que je fais face à Andreï et tends la main vers les vêtements qu’il a rapportés, je lève finalement les yeux vers lui. Il voulait voir Anya, son Anya, sa précieuse et détestée Anya ? Parce que si c’est le cas, elle lui fait face. Elle a davantage le regard et le sourire mauvais de celle que j’étais avant, elle a même tout de l’allure féline que je n’ai plus.

« Tu ne vas quand même pas me demander de dire s’il-te-plaît ? »

Et tout s’accélère. Je ne contrôle plus rien, marionnette impuissante d’un instinct et de réflexes que je pensais disparus. Mon autre main se lève, et ce que j’ai pris pour de l’eau m’apparaît : un couteau. C’est pour ça que je suis allée dans la cuisine. La lame glisse sous la gorge de Lindberg, l’autre main glisse le long de son bras et de son poignet avec une sensualité que je lui sais insupportable. Il y a dans cette proximité que je lui impose une dangerosité et une attraction tentatrice qui n’ont rien à faire là. Mais tant pis : il l’a cherché. Ma main libre quitte son poignet, effleure doucement son t-shirt et le bas de son dos, tandis que mon regard se fait provoquant. Alors quoi ? Tu vas rester là à me regarder bêtement ? Mes doigts se heurtent un objet et, avec un sourire satisfait, j’extrais de sa cachette un 9mm jalousement gardé. La lame du couteau toujours plaquée contre la pomme d’Adam de Lindberg, je tourne mon regard vers le revolver.

« Donc… je suis une salope égoïste, une connasse, une traitresse, je devrais me mettre une balle dans la tête… et ça résoudrait tous tes problèmes. On essaye, pour voir ? »

La sécurité saute et le canon du revolver vient embrasser ma tempe sans que je ne détourne un seul instant mon regard de celui d’Andreï.

« Pan ! »

Y a un éclat de folie dans mon regard, un éclat qu’il n’a jamais dû voir que dans mes rares moments d’insanité, ceux où je laissais la lucidité de côté pour me protéger des horreurs auxquelles je devais faire face. Cet éclat de folie, c’est lui qui l’a ravivé. M’arrachant à cette détestable proximité, je recule, retire le couteau de sa gorge et le met en joue, le canon du revolver pointé sur son cœur.

« C’est vraiment dommage, tu sais. Si tu t’étais contenté de me filer des fringues, je serais partie et je t’aurais foutu la paix. Mais tu peux pas t’en empêcher, faut que tu causes, hein ? Et blablabla connasse, et blablabla fous-toi en l’air… On t’a jamais dit que haine et amour était étroitement liés ? J’ai la réponse que je voulais : pour me haïr à ce point, c’est que t’a dû m’aimer à un moment donné. Je me souviens pas de grand-chose mais ça finira par revenir… »

Non, vraiment, Andreï… tu es sûr que tu voulais voir Anya plutôt que l’amnésique de service ? Te voilà servi, tu as droit à leur rejeton dysfonctionnel et inachevé.

« J’vais pas te répéter les choses quarante fois. Rend-moi mon collier. Si t’es pas capable d’être Andreï, si tu préfères être cette couille molle de Lindberg, t’as pas à le garder. Alors donne-moi ou je t’en colle une juste là, dans ton petit cœur de pierre malmené par une vie de merde. »

La provocation, les insultes, l’agressivité… ça a toujours été notre réponse à tout ce que la vie a pu nous faire subir. Ça a toujours été notre première façon de communiquer. Ça a toujours été notre dernier rempart…

« Tu peux me traiter de connasse, d’égoïste, de ce que tu veux… mais y a une chose que j’te laisserai pas dire. Même amnésique, y a des choses qui restent. Et je ne t’ai pas trahi. Je ne t’aurais jamais trahi. »

Mais toi, tu m’as tuée, me hurlent ces souvenirs éparses et mal agencés. Il ne sait pas ce qu’il a réveillé, moi non plus, mais je ne m’en irai pas sans mon collier, dussé-je y laisser ma santé mentale et ma vie.
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Andreï S. Rostov
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MessageSujet: Re: Andranya | Blackout   Andranya | Blackout EmptyMar 28 Mai - 23:33

Blackout

A l’amour déçu, à la confiance trahie, aux brutales désillusions et aux espoirs lacérés, il n’y a qu’une seule réponse possible : la colère. La fureur. La haine franche et violente pour mieux aveugler tout le reste, pour mieux oublier tout le reste. J’ai les nerfs à vif, l’agressivité à fleur de peau. J’ai la rancœur, les regrets, la déception qui me rongent de l'intérieur, ternissent mon regard, noient mon environnement d'un horizon rouge sang. Me font perdre le peu de lucidité que je me démène pour avoir. Qu'est-ce qu'elle croit, qu'il lui suffit de débarquer chez moi la bouche en cœur pour que je l'accueille les bras grands ouverts ? C'est ce que j'ai fait. Et bien non, ça ne fonctionne pas comme ça, je refuse que ça fonctionne comme ça. Qu'est-ce qu'elle croit ? Qu'il lui suffit de me demander de l'aider pour que j'accepte sans arrière-pensée, sans me remettre en question ? C'est ce que j'ai fait. Et bien non, ça ne suffit pas. Ça ne suffit plus. Ça n'a jamais suffi. La colère, elle m’aveugle, elle sature mes sens, elle me pousse à répondre sans la moindre douceur. Qui est-elle ? Une salope. L’insulte est sincère, crachée comme du fiel à sa gueule ; ce qu’elle est ? Une traître, une menteuse, une hypocrite, une putain d’enflure qui m’a berné comme elle en avait déjà berné plein d’autres avant moi. Ce qu’elle est ? Un cauchemar. Et qui je suis ? J’ai le pendentif qu’elle m’a foutu dans les mains qui creuse ma paume et abime ma peau, pour mieux me rappeler qui je suis. Quand je reviens vers elle, ce n’est pas en étant calmé. Je lui balance des fringues, je lui balance des ordres, je lui balance des noms, je lui balance tout sauf la moindre patience… Qui je suis ? Le petit con qui s’est complètement fait avoir, celui qui est tombé amoureux d’elle, qui lui a ouvert une porte dans laquelle elle s’est engouffrée pour tout saccager avant de repartir le sourire aux lèvres. Bordel, que j’ai des envies de meurtre quand je pense à ça.

Bordel, que ces envies de meurtre pâlissent et se décolorent quand je retrouve son visage, quand je suis bien obligé de la regarder dans les yeux, de lorgner sur sa silhouette, sur sa poitrine, sur tout ce qu’elle est, sur ses rétines et sur ses traits tendus. Je serre davantage le poing, pour que la morsure du collier me rappelle ce qu’elle arrive un peu trop facilement à me faire oublier. J’ai une loyauté. Je refuse de tout risquer une seconde fois. Je refuse de me faire avoir, de rompre la distance, de me laisser convaincre et persuader par ses bégaiements et ses mensonges. Je n’ai pas passé cinq ans à essayer de me reconstruire pour lui octroyer le droit de tout balayer d’un geste et d’un regard. Qui elle est ? Une traître. Et je ne sais même pas ce qui serait le pire entre le fait qu’elle mente et qu’elle se joue encore de moi, ou qu’elle me dise la vérité et qu’elle ne se souvienne de rien. Dans le premier cas, je jure que je serai le premier à désolidariser sa tête de son corps. Dans le second… c’est elle qui se foutra une balle dans la gueule quand elle se souviendra de ce qu’elle m’a fait.  

Elle veut que je réponde à ses questions ? Elle exige des réponses ? Et bien c’est tout ce qu’elle aura de moi. Quand je finis par lui cracher de se barrer, c’est de la haine pure qu’elle doit lire dans mes yeux, dans ma voix, dans mon attitude et dans mon poing serré. Parce qu’elle croit peut-être que je n’ai pas vu son sourire disparaître, ses yeux dériver vers son collier que je retiens toujours en otage ? Rien à foutre, elle ne le récupèrera pas.

Elle se décolle de la fenêtre, je n’ose pas croire qu’elle va m’obéir. Anya n’obéit pas, elle fait un doigt d’honneur et s’applique à tout faire sauf ce qu’on lui demande. Et là-dessus, menteuse ou pas menteuse, elle n’a pas changé. Loin de s’éloigner, de prendre ses cliques et ses claques – mais qu’elle se rassure, des claques elle va finir par en prendre – elle fait un pas vers moi. Je me crispe, sur la défensive. « Tu as sûrement raison… qui se soucie d’une amnésique, hein ? Et si je t’ai trahi, c’est légitime que tu m’en veuilles… je peux bien achever l’œuvre de celui qui m’a laissée pour morte il y a cinq ans… » Je me crispe davantage. J’encaisse le coup, mais je l’encaisse mal. Fais-toi plaisir je siffle. Qu’elle achève donc ce que je suis incapable d’achever depuis cinq ans, tiens. Mais qu’elle reste à distance de moi. J’entends sa voix, sa moquerie, j’entends le rire glacé de ses mots, pour tourner en dérision chacun de ses mots. Je pourrais presque entendre dans son ton l’impulsion monstrueuse qu’elle donnait à nos cibles pour leur faire cracher le morceau. Elle se détourne de moi pour faire un détour vers le canapé où sont retombés en vrac les fringues que je lui ai sorties, j’ai la nausée quand je me rends compte que je respire mieux. « Rends-moi mon collier. » Elle se redresse, relève ses yeux vers moi. Crève Ouais, qu’elle crève. Qu’elle crève et je lui rendrai avant de me servir des quais pour faire disparaître son corps. « Tu ne vas quand même pas me demander de dire s’il-te-plaît ? » J’hausse un sourcil. J’ai même l’ombre d’un putain de sourire devant le tutoiement. Juste un sourire, qui se volatilise sans demande son reste à l’instant où…

Il ne s’est pas passé plus d’une poignée de seconde. Un battement de cœur, deux, trois, je ne sais pas, mais en l’espace d’un instant, son rythme cardiaque a fluctué, mes réflexes ont pris le dessus, battus à plate couture par les siens. Quand tout s’immobilise aussi brusquement que ça a démarré, j’ai une lame plaquée contre ma gorge, la main d’Anya qui glisse le long de mon bras, qui me hérisse les poils et me coupe la respiration. Je ne bouge plus. Immobile jusqu’à ma respiration, minime, ma cage thoracique. Ses doigts continuent leur exploration, deviennent intolérables. Je la foudroie du regard, dans l’attente de la moindre ouverture. Tout en sachant qu’Anya ne m’en laisse jamais, jamais au corps à corps. Mon tee-shirt s’agite, son contact me brûle le bas du dos, se saisit de mon putain de flingue que je n’ai même pas eu le temps d’aller chercher. Trop concentré sur ses seins et sur son odeur pour anticiper… ça. Anticiper ce qu’elle a toujours fait, ce qu’elle a toujours su faire, ce qu’elle n’a clairement pas oublié malgré tout ce qu’elle me raconte. « Donc… je suis une salope égoïste, une connasse, une traitresse, je devrais me mettre une balle dans la tête… et ça résoudrait tous tes problèmes. On essaye, pour voir ? » Un soupçon d’incompréhension. Quoi ? Puis la compréhension.

Mon cœur rate un battement. Non ! « Pan ! » Nos voix se chevauchent, j’ai un mouvement en avant, une douleur aigue à la nuque, la douleur d’une lame parfaitement aiguisée esquintant un peu de chair ; un mouvement, une douleur, un filet de sang inutile : elle a déjà repris ses distances, me tient en joue avec mon propre flingue. Humiliation complète pour un assassin surentraîné. « C’est vraiment dommage, tu sais. Si tu t’étais contenté de me filer des fringues, je serais partie et je t’aurais foutu la paix. Mais tu peux pas t’en empêcher, faut que tu causes, hein ? Et blablabla connasse, et blablabla fous-toi en l’air… On t’a jamais dit que haine et amour était étroitement liés ? J’ai la réponse que je voulais : pour me haïr à ce point, c’est que t’a dû m’aimer à un moment donné. Je me souviens pas de grand-chose mais ça finira par revenir… » Mes doigts se serrent une nouvelle fois autour de la chaîne du collier, alourdie par le pendentif qui leur a échappé dans l’action. De quel droit elle ose me parler d’amour, cette connasse ? J’ai les nerfs à vif, sa proximité me désarme, me tétanise, me fragilise, j’en suis conscient. C’est pas son flingue qui s’agite sous mon nez qui me fout la trouille. C’est elle. Imprévisible. Instable. Incohérente. Inconnue. Quand elle reprend, je n’ai toujours pas fait le moindre geste alors que tout mon entraînement me hurle ce que je dois faire, ce que je sais faire. Ce que je fais pas.  « J’vais pas te répéter les choses quarante fois. Rends-moi mon collier. Si t’es pas capable d’être Andreï, si tu préfères être cette couille molle de Lindberg, t’as pas à le garder. Alors donne-moi ou je t’en colle une juste là, dans ton petit cœur de pierre malmené par une vie de merde. Tu peux me traiter de connasse, d’égoïste, de ce que tu veux… mais y a une chose que j’te laisserai pas dire. Même amnésique, y a des choses qui restent. Et je ne t’ai pas trahi. Je ne t’aurais jamais trahi. » Trahi.

Mes muscles se tendent, avant de se relâcher, dans la décontraction qui précède la moindre attaque, comme je l’ai appris il y a plus de vingt ans. Qu’est-ce que tu en sais ? Tu ne sais même pas comment tu t’appelles, tu ne te souviens pas de qui je suis, comment peux-tu affirmer que tu ne m’as pas trahi ? J’inspire. Avant de me mettre en mouvement dans mon expiration. Mes mains se saisissent du flingue, lui balancent un coup de coude dans la foulée, mon genou percute son entrejambe, mon uppercut la cueille au menton ; je n’ai pas fini d’expirer que j’ai remis une putain de distance entre elle et moi et que l’arme a changé de main. Elle ne me tient plus en joue, tout au contraire. Flash. Mes doigts s’attardent sur le percuteur. Flash. Le canon s’oriente vers ses genoux. Flash. Mes bras se mettent à trembler. Je remets la sécurité. Putain. Je vais à l’encontre de vingt ans d’endoctrinement quand en quelques gestes brefs je décharge mon flingue, jette le chargeur d’un côté de la pièce, l’arme de l’autre, me désarme face à une machine à tuer en possession d’une lame capable de me vider de mes entrailles aussi facilement que si j’étais qu’une putain de carpe. Tu te rends compte de ce que tu me racontes ? Soit tu sais que tu ne m’as pas trahi, mais dans ce cas, tu n’es pas une putain d’amnésique et tu me mens depuis le début, ce qui fait que tu me trahis malgré tout. Et ça signifierait surtout que quelqu’un d’autre l’a piégée, il y a cinq ans, et m’a forcé à lui foutre une balle – et tout un chargeur – dans le bide. Soit tu es amnésique, auquel cas, tu n’as rien sur quoi te baser pour m’affirmer ça. Moi, j’ai les faits. Alors tu sais quoi Anya ? Va te faire foutre. Je ne t’aime pas, je ne t’ai jamais aimé. C’est un mensonge. Sauf qu’elle ne peut pas entendre les battements de mon cœur qui s’affolent. Si j’ai aimé quelqu’un, c’était une illusion que TU as fait voler en éclats quand TU as essayé de me tuer. Et même si je modifie légèrement la réalité, si elle est réellement amnésique, alors elle n’a aucune raison de ne pas me croire.

Ma colère est sincère, elle. Tu veux récupérer ton collier ? Il ne t’appartient pas. Tu ne le mérites pas. Après tout, tu ne sais même pas ce qu’il représente. Comme une provocation, comme si elle en avait besoin. Je cille. Maintenant fais pas la conne, enfile cette putain de chemise.

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