Dans l'une des plus belles maisons de Saint-Pétersbourg, au sein d'une famille riche et influente, naît une petite fille au yeux verts et aux cheveux noir de jais. Elle voit le jour au milieu du faste, de l'argent et de privilèges mais il y a pourtant quelque chose qui cloche : elle n'est pas désirée. Pire, cette enfant est une honte. Fruit de l’adultère entre une femme malheureuse et délaissée par son mari, et d'un chauffeur un peu trop opportuniste, la gamine ne fait pas long feu dans son berceau. Fou de jalousie, le mari trompé ignore les larmes de son épouse, dépose le nourrisson devant la porte d'un orphelinat et s'en va sans demander son reste. Sans même accorder à la mère effondrée le droit de baptiser la petite.

Alors elle commence comme ça, la vie de cette gamine. On l'appelle Natasha, parce qu'il faut bien lui donner un nom, et elle rejoint la ribambelle de petits humains sans famille ni repères qui peuplent déjà l'orphelinat. Elle n'est pas vieille, Natasha, mais elle commence déjà à se battre et à mordre dès qu'on essaye de lui voler son dessert.

À force de distribuer des coups de poing, Natasha se retrouve punie et seule la plupart du temps. Tant pis. Ça lui va. Et sœur Olga, l'insupportable nonne qui s'évertue à penser qu'on peut encore sauver l'âme de cette gamine, s'aperçoit que Natasha l'aime, cette solitude. Parce qu'elle peut lire, elle peut observer, elle peut apprendre, quand elle est loin du brouhaha des dortoirs. C'est triste, se dit sœur Olga, parce que la petite pourrait essayer de se lier aux autres mais Natasha s'en fiche : elle a bien trop peur de s'attacher aux autres gamins alors elle frappe, elle les tient à distance et elle s'isole.

Un matin de mai, on fait enfiler leur plus jolie robe aux gamines et leur plus beau costume aux gamins. Natasha se sent bête, avec ses cheveux tressés et les frous-frous insupportables qui l'empêchent de bouger. À quoi rime ce cirque ? C'est le jour des adoptions, leur dit-on. Certains sont surexcités, essayent déjà d'imaginer leurs futurs parents, d'autres en vomissent d'angoisse. Natasha, elle, s'en fiche. Elle n'a pas envie d'être adoptée. Alors, tandis qu'on la cherche partout pour la présenter, elle saute à pieds joints dans une flaque d'eau, couvrant sa jolie tenue de boue. Avec ça, on ne risque pas de la choisir, se dit-elle. Seulement, ils n'ont rien à voir avec des parents normaux, les types qui observent les gamins un à un comme on regarderait un article de prêt à porter. Ça sent le roussit, se dit Natasha, mais elle a tout juste le temps de relever le menton avec un air de défi qu'une vieille femme aux traits tirés la pointe du doigt. L'orphelinat, c'est terminé, et Natasha disparaît des radars. Elle devient Anastasia Chostakovitch, nom sans originalité choisie par une vieille peau un peu trop passionnée de musique russe.

Les premiers temps, Anya n'a pas compris pourquoi elle et pas les autres. Pourquoi avoir été choisie alors même qu'elle s'était évertuée à avoir l'air d'un véritable souillon. Et puis la gamine a grandi, a découvert l'envers du décor et a compris : c'est parce qu'elle n'a pas peur des grands et de l'autorité qu'on l'a choisie. C'est parce qu'elle réécrit les règles comme le font tous les enfants insolents et même si elle est encore trop jeune pour tout comprendre, elle le cache bien. Durant deux ans, elle passe le plus clair de son temps à subir des tests divers et variés et à être observée comme un rat de laboratoire. Elle se rebiffe. Souvent. Elle prend des coups. À chaque fois. Mais elle se relève. On modèle son corps, on la formate, on la pousse dans ses retranchements et si elle n’excelle pas au corps à corps par manque de force brute, elle est d'une souplesse et d'une agilité sans pareil. Alors que les scientifiques qui suivent le projet pensent Anya dépourvus du moindre don surnaturel, ils finissent par déceler en elle un talent particulièrement aiguisé pour la persuasion : un regard, un geste, quelques mots, et elle obtient généralement ce qu'elle veut.

À tout juste 15 ans, Anastasia est une jeune fille au corps athlétique et une danseuse accomplie. Dans son for intérieur, elle s'imagine un jour monter sur les planches d'un Opéra pour y incarner le premier rôle d'un de ces ballets romantiques qui la font tant rêver. Et puis après, la réalité la rattrape et elle se retrouve à nouveau en train de se battre pour survivre tout en niant la réalité : elles étaient 6 en 2030, elles ne sont plus que 2. C'est alors qu'on lui présente Andreï, un gamin pas bien grand, rachitique et qui crache comme un chaton qui se prendrait pour un grand. Elle en rigole, Anya, jusqu'à ce qu'on lui annonce qu'il va falloir qu'elle fasse équipe avec lui. Équipe ? Qui a parlé d'équipe ? Débute alors un long et douloureux travail personnel, celui de la confiance.

Le monde vire au carnage. Enfin… plus encore qu’avant. Les territoires d’Asie volent en fumée tandis que les plus opportunistes y voient un moyen de s’enrichir. C’est le cas de Georg et de son organisation : formés à tuer, à extorquer et à torturer, Anya et Andreï sont missionnés pour envenimer les choses et servir les intérêts de celui qu’ils craignent autant qu’ils admirent. Du sang, ils en ont sûrement plus sur les mains que dans les veines et pourtant, la culpabilité a depuis longtemps déserté leur esprit. Ils n’ont pas de regrets, ils exécutent.

Un dérapage est vite arrivé… alors qu’ils avaient pour ordre de n’être que des partenaires sans attaches, Anastasia et Andreï cèdent à leurs pulsions les plus humaines, tout en se faisant la promesse de ne pas s’attacher l’un à l’autre. Malheureusement, l’attraction fait son effet et sans qu’elle ne s’en rende compte, Anastasia bascule d’un mépris distant à une affection tendre pour son coéquipier, son soutien, celui qui finit par devenir son meilleur ami.

Tout va pour le mieux pour Anya. La gamine de Saint Pétersbourg est devenue une bonne comédienne et une redoutable espionne, à tel point qu’elle en nargue Georg : tout sera bientôt en place pour qu’elle et Andreï s’enfuient et partent refaire leur vie ensemble. Elle est confiante, Anya, bien trop confiante… elle néglige la paranoïa et la perspicacité de Georg, à tel point que lorsqu’il la convoque pour lui confier une mission en solo, elle ne se doute pas une seconde qu’il a tout compris.

Ce qui n’aurait dû être qu’une mission de routine s’est transformé en traque acharnée. Anya s’est appliquée, Anya a tout donné pour retrouver sa cible… et puis tout s’est arrêté. Elle l’a trouvé avant lui et elle le sait. Seulement, lorsque c’est le nom d’Andreï qui est sorti, elle n’y a pas cru. Elle a refusé de croire qu’il puisse préférer la captivité à la liberté, qu’il puisse la trahir pour ce monstre qu’est Georg. Aveuglée par une confiance qu’elle s’obstine à avoir en Andreï, Anya a fuit sans se retourner, déterminée à trouver une solution pour sauver son ami, son amant, son… son quoi, au juste ? Comment devrait-elle le considérer, maintenant que le doute s’insinue en elle ? Elle fuit, Anya, elle embarque avec elle quelques hommes de main fidèles, elle s’entoure d’une petite poignée de personnes à qui elle ne fait pas confiance mais qui valent mieux que la solitude. Elle fuit, elle ignore les appels de Georg mais rien n’y fait. Au moment où elle s’y attend le moins, Andreï la retrouve.

Anya tente de raisonner Andreï, en vain. La tendresse, la raison et les insultes, rien n’y fait, il voit rouge. Anya le connaît, cet Andreï, ce monstre tapis sous sa carcasse de rat, cette boule de nerfs que rien ne peut arrêter… Elle encaisse les premiers coups, se défend plus qu’elle n’attaque mais bientôt, les vociférations d’Andreï et les coups de feu à répétition sapent le peu qu’il lui reste d’énergie. Avec l’hyperacousie qui la ronge, c’est au bord du malaise qu’elle s’effondre tandis qu’Andreï l’immobilise pour mieux la rouer de coups. Quelque part, elle se laisse faire, Anya. Parce qu’elle est blessée, meurtrie dans son âme bien plus que dans sa chair. Parce qu’elle souffre de voir qu’il a préféré faire confiance à un salaud plutôt qu’à elle… parce qu’elle se rend compte que la confiance qu’elle a placé en lui n’est pas réciproque. Elle pourrait se laisser mourir sous les coups, ça ne changerait pas grand-chose, mais il prononce les quelques mots qui vont suffire à la mettre suffisamment en colère pour qu’elle décide de se battre : il l’aime. Et ça, elle ne peut pas l’accepter, parce qu’ils avaient dit pas d’amour, pas de sentiments de ce genre, et qu’on ne peut pas aimer quelqu’un et souhaiter à ce point sa mort. Alors elle enrage, Anya, malgré un corps désarticulé et un visage tuméfié...

Lorsque Anastasia se réveille à l’hôpital, elle met un moment à comprendre ce qui va devenir son plus gros handicap dans les années à venir : elle est totalement amnésique, ne sait plus qui elle est, comment elle s’appelle ni d’où elle vient. Pendant plusieurs mois, elle suit une lente et douloureuse rééducation pour reprendre le contrôle de son corps et de sa vie. Dans cette épreuve, elle est aidée par Matthew, le médecin qui l’a trouvée pratiquement morte, dans le hangar où Andreï l’a abandonnée.

Anya a intégré la brigade criminelle peu de temps après sa sortie de l’hôpital et use, sans le savoir, de son don de persuasion au quotidien lorsqu’il s’agit d’arracher des aveux à un prévenu. Depuis peu, c’est une organisation secrète qui est dans son collimateur. Seulement, ce qu’elle ignore encore, c’est que cette organisation, elle en a fait partie. Et celui qu’elle traque, c’est Andreï.

Salut ! Moi c'est Mathilde mais appelez moi Skweecky. J'ai connu le forum via Marelle et je pense que votre avis sur le forum, positif comme négatif.
Sur une échelle de présence de 1 à 7, je pense être présent(e) 4/7.

« Je t’aime, Anya, mais t’aurais jamais dû faire ça. »


Je ne sais pas ce qui fait le plus mal… ses mots ou ses coups ? Du sang coule dans ma nuque, un ultime spasme parcourt mon dos mais je me mords la langue pour empêcher cette larme de quitter mes paupières tuméfiées. Je te donnerai pas cette satisfaction, Andreï, parce que de nous deux, c’est toi le traitre. C’est toi qui a préféré te ranger aux côtés d’un monstre plutôt que de suivre la voie de la liberté. C’est toi le salopard et toute l’affection que j’ai pu avoir pour toi, tu viens de la réduire à néant comme si je ne valais pas plus que tous ceux que tu as pu tuer depuis que t’es gamin. T’es vraiment un beau salaud… suffisamment crédible pour croire un salopard, suffisamment en mal d’affection pour tomber amoureux… on avait dit pas d’amour, Andreï. T’avais pas le droit de tomber amoureux de moi, t’avais pas le droit de changer les règles de notre relation, t’avais pas le droit de m’imposer ça. J’en veux pas, d’ton amour, je voulais juste ta confiance. Alors va au diable… dégage et laisse-moi crever là comme un clebs qu’on aurait abandonné dans un caniveau.


Laisse-moi là alors que j’avais enfin trouver un moyen pour qu’on s’enfuit tous les deux.


Et le voilà qui s’en va, sans même s’être assuré que je suis vraiment morte. Pourtant je le sais, que je vais mourir ici. Respirer est devenu difficile, du sang s’échappe sans discontinuer de chaque plaie qu’il a laissé sur ma pauvre carcasse… je vais crever, c’est certain. Je n’ai pas envie de mourir. Pas parce que je pense que la vie a de belles choses à m’offrir, ça, c’est une connerie pour les mômes, mais parce que je veux avoir l’occasion de me venger. Je veux lui arracher ses jolis yeux bleus et les faire bouffer à Georg avant de les faire cramer tous les deux. Ouais… ça me tente bien, un plan de ce genre ! Et c’est ça qui me maintient en vie pour le moment, alors même qu’Andreï a foutu le camp et qu’autour de moi, tout pue le sang et l’eau croupie. Putain… pourquoi on en est arrivés là, au juste ? Parce qu’un enfoiré de manipulateur a su tirer sur la corde sensible pour manipuler Andreï. Il a l’air fort, quand il brandit les poings mais au fond, c’est toujours un petit garçon qui ne rêve que d’une chose : un foyer, de l’amour, de la tendresse, ces conneries dont il est difficile de se défaire… je ne peux pas l’en blâmer, moi aussi j’aurais aimé connaître ça. Mais c’est trop tard parce que soit je vais rejoindre mes ancêtres inconnus, soit je me relève et si je me relève, tu ne vas pas aimer, Andreï. Tu ne va pas l’aimer, ma colère, pas plus que tu n’apprécieras ma haine. De toute manière, tu t’en fous, n’est-ce pas ? C’est pas toi qui viendras traîner ta sale face de rat sur ma tombe pour pleurer.


La gorge sèche et le corps perclus de douleurs diverses et variées, je fixe sans le voir le plafond. Alors c’est ça, ce qu’on ressent quand on meurt ? Un mélange de fatigue, de regrets et de colère ? Si je ne vois pas ma vie défiler devant mes yeux, je me la remémore pourtant, pour me maintenir éveillée. Je n’ai pas connu mes parents et, quelque part, c’est sûrement mieux comme ça. S’ils m’ont abandonnée, c’est qu’il y a sûrement une raison - très mauvaise - et même si ça aurait changé bien des choses à mon existence, ça ne sert à rien de revenir là-dessus. Et puis au fond… je n’étais pas trop mal à l’orphelinat. Ce n’était pas le grand luxe, les autres gamins n’étaient pas toujours tendres mais on mangeait à notre faim et on avait un toit sur la tête.


C’est après, que les choses se sont gâtées. Quand Georg et sa vieille peau de bras droit se sont pointés pour “adopter” des gamins. Acheter des cobayes serait plus juste, mais ne pinaillons pas sur les détails. On était six, six gamines récupérées dans différents orphelinats, six enfants complètement paumées et sans attaches. Au début, ils ont testé nos facultés motrices et intellectuelles, se sont penchées sur notre résistance à la douleur, au chaud, au froid… certaines hurlaient, d’autres murmuraient en boucle des prières entrecoupées de sanglots pour supplier une quelconque divinité de leur venir en aide. Mais y a jamais eu personne pour nous sortir de là. Quand on a compris qu’on seraient livrées à nous-mêmes, les plus faibles ont baissé les bras tandis que les autres se sont battues. C’est à cette époque qu’on a perdu Tatiana. Elle a cessé de parler, de pleurer et même de manger. C'est devenu une coquille vide et j'ai compris qu'elle n'en avait plus rien à faire de tout ça. Enfin j'ai compris... j'avais 12 ans, allez donc comprendre ça à 12 ans ! Toujours est-il qu'à force de ne plus se nourrir, Tatiana a été la première à succomber. On ne sait pas trop où ni comment ils l'ont enterrées. À vrai dire, on n'a pas trop cherché à savoir. La suivante, ça a été Nina. Pourtant, c'était une vraie brute. Le genre de gamine qui s'est mise à mordre pour un bout de pain et qui nous aurait toutes vendues pour rester en vie. Je crois que c'est un genre de grippe qui l'a emportée... quelque chose qui l'a fait délirer pendant des jours avant qu'on n'entende plus un bruit.

Alors voilà, on s'est retrouvées à quatre. Puis trois. Et quand on a plus été que deux gamines, deux bêtes capables de survivre dans les pires conditions, avec un organismes bouffés par des substances dont je ne veux toujours pas connaître la composition, on nous a dit qu'on était prêtes. Mais prêtes pour quoi ? Prêtes pour les grands desseins mystérieux de Georg, visiblement. Alors, quand il a fallu traverser la moitié de la Russie par nos propres moyens et sans un rond, je me suis mise à réfléchir. Y aller à pieds, ça aurait été du suicide et pourtant, Elena, l'autre gamine, s'est lancée à corps perdu cette aventure grotesque tandis que je restais là, devant la porte du bâtiment qui nous avait accueillies tant d'années. La liberté, voilà ce que j'ai vu devant à ce moment-là, masquée par la puanteur de la mort. Je n'ai jamais revenu Elena après ça. On m'a racontée qu'elle était morte de froid, quelque part en Sibérie, pendant que moi, je faisais le trajet confortablement installée dans la soute d'un luxueux train transsibérien. Comme je m'y suis prise ? J'ai fait les yeux doux au conducteur du train, en lui disant que j'étais une enfant égarée, que je devais rejoindre mes parents, blablabla... quelques larmes, un peu de panique dans la voix et il s'est empressée de me faire une place entre les valises et les stocks de vivres.

C'est comme ça que je suis arrivée bien avant Andreï à l'adresse convenue, comme ça que, dès notre rencontre, j'ai pu le narguer avec un grand sourire fier. Sourire que j'ai vite perdu quand on m'a dit que j'allais devoir faire équipe avec. Il s'en serait bien passé et moi aussi, les premiers temps. C'est qu'il rapidement gonflée, le gamin ! Pas assez patient, trop énervé, j'ai commencé à craindre ses colères dès que j'ai compris qu'une simple contrariété pouvait provoquer une désastreuse réaction en chaîne lui.

Et pourtant... il est passé du coéquipier détesté au partenaire ignoré, puis à l'ami apprécié et, enfin, au confident... aimé ? Je n'irais pas jusqu'à dire ça. Ne sachant pas ce que c'est que l'amour, je ne sais pas si ce que j'ai pu éprouver pour Andreï est réellement de l'amour. Toujours est-il que nous sommes devenus inséparables et, par la même occasion, imbattables. On se complétait parfaitement, lui par la puissance de ses coups, moi par la finesse de mon esprit. Y avait rien qui pouvait nous arrêter, pas même la frontière que Georg avait fixé entre nous. Cette frontière, il l'a envoyée valser avec nos fringues le jour où on a décidé qu'on se plaisait un peu trop pour ne pas en profiter.

Alors voilà à quoi elle a pu ressembler, ma relation avec Andreï. Tout allait pour le mieux jusque là, on avait prévu de s'enfuir, de monter un plan pour disparaître des radars de Georg mais au final, c'est lui qui nous a eu. Enfin... c'est lui qui t'a eu, Andreï. J'ai envie de serrer les poings, mais mon corps ne m'obéit plus. Chaque respiration est plus douloureuse à chaque seconde et, lorsque je ferme les yeux pour ne plus les rouvrir, une dernière pensée m'empêche de sombrer complètement : je vais te faire la peau, Andreï Rostov.


***


Quand j'ouvre les yeux, je me demande pendant un instant si je ne suis pas morte. Et je réalise qu'on m'a toujours vendu la mort comme un moment les douleurs et tourments cessent définitivement. Or, là, j'ai l'impression que chacun de mes muscles et nerfs est douloureux, que le simple battement de cœur provoque une décharge électrique dans ma poitrine et... où suis-je ? Ma vision est trouble, tout ce que je vois, c'est un halo lumineux... sûrement un néon ? Dans un écho désagréable, j'entends un bip régulier... un électrocardiogramme ? Je dois être dans un hôpital, je suppose. Mais qu'est-ce que j'y fais ? Pourquoi ai-je si mal et...

Plus important encore, qui suis-je ?

Réalisant que je ne parviens même pas à me souvenir de mon nom, je sens la panique me gagner et le bip s'accélérer. Quelque chose en moi me hurle que je ne devrais pas me trouver ici, que c'est dangereux et que je dois trouver à tout prix me moyen de m'enfuir. Au prix d'efforts qui me paraissent surhumain, je parviens à me redresser et à arracher tous les capteurs qui me relient à ce foutu appareil à bip. Je m'apprête à arracher la perfusion fichée dans mon bras quand un type entre dans la chambre. Aussitôt, dans un geste d'une rapidité qui m'étonne moi-même, j'attrape le premier objet qui me tombe sous la main, à savoir un verre vide, et le lui jette à la figure. Heureusement pour lui, entre la vision trouble et la faiblesse, je manque ma cible et le verre va finir sa course dans le mur derrière.

« Hè ! Doucement ! Tu as faillit m'éborgner ! »

Tu ? Depuis quand un médecin tutoie ses patients, hein ? Interdite, je le dévisage. Il a cette expression sympathique du gentil docteur qui doit mettre tout le monde en confiance, je n'en doute pas et... son visage me dit quelque chose. C'est bien la première chose que j'ai l'impression de connaître aujourd'hui. J'ouvre la bouche pour lui rétorquer que l'éborgner était précisément le but mais aucun son ne sort à l'exception d'un râle ridicule.

« N'essaye pas de parler, tu as eu les cordes vocales bien abîmées... »

Je le vois qui hésite, prend une chaise pour s'asseoir et me dévisage un moment avant de se lancer.

« Est-ce que tu te rappelles de quelque chose ? »

Ma gorge se noue lorsque je secoue la tête.

« Je t'ai trouvée dans un vieux hangar de la ville il y a deux semaines. Je... je suis désolé, tous les autres sont morts mais toi... tu avais l'air de t'accrocher, tu n'as pas arrêté de me répéter qu'il fallait que tu le retrouves. Je ne sais pas de qui il s'agit mais tu avais l'air très remontée après lui. »

Mais tout ça ne me dit rien. Pas moyen de me souvenir de ça, si ce n'est que je comprends mieux pourquoi le visage de ce médecin m'est familier. Et il est bavard, le bougre ! En l'espace de quelques minutes, il m'explique qu'il s'appelle Matthew Blake, qu'il est chirurgien général à l'hôpital où je me trouve et qu'il m'a trouvée dans un hangar où il prenait des photos. Voyant mon air plus que surpris, il se met à rougir en avouant avoir une passion pour les vieux bâtiments en ruines. Un chirurgien adepte de l'urbex, mais sur quoi je suis tombée ? Il faut admettre que pour le coup, j'ai eu de la chance que ce soit lui qui me trouve car si j'en crois ce qu'il me dit, quelques poignées de minutes plus tard, personne n'aurait pu me sauver. Tandis qu'il parle, je hoche simplement la tête. C'est drôle, quand même... j'en sais maintenant plus sur lui que sur moi-même. La discussion dérive et il en vient à m'expliquer mon état tout en m'examinant. Je découvre des membres couverts de tatouages dont j'ignore la signification et qui ne font qu'alimenter davantage la longue liste de questions que je me pose. Quant au diagnostique... Multiples fractures des côtes et aux bras, deux balles dans le thorax et le visage labouré de coups. D'après lui, la personne qui m'a fait ça était soit inhumaine, soit dans une rage folle qui dépasse l'entendement. Et là, la seule question qui me vient c'est : comment peut-on haïr suffisamment quelqu'un pour lui faire subir ça... tout en le laissant en vie à l'arrivée ? Je devrais avoir peur ou peut-être être triste, mais tout ce que je ressens à cet instant, c'est une intense et brûlante colère sortie de je ne sais où. Si seulement je pouvais me souvenir de son visage...

« La convalescence sera longue... tu as été opérée deux fois cette semaine et il faut encore que l'on te réopère pour remettre tout en place au niveau de ton visage car tu as encore la mâchoire immobilisée pour le moment. Ah et... tu portais ça autour du cou, quand je t'ai trouvée. »

Il me tend un collier en argent serti de diamant, un bijou d'une grande finesse qui, au-delà de sa beauté, m'évoque un raz de marée d'émotions si contradictoires que je passe d'un mutisme complet aux sanglots en l'espace de quelques secondes. Je ne comprends rien à ce qui m'arrive et lorsque Matthew, gêné, s'approche pour m'enlacer maladroitement, j'ai un geste de recul et de terreur instinctif. Il se ravise donc, se contente de poser une main sur mon bras.

« Hè... ce n'est pas grave, tes souvenirs vont revenir. Ça prendra du temps, mais je vais t'aider, ok ? »

Je hoche la tête, serre le bijou entre mes doigts et le laisse terminer son auscultation.

Voilà donc où j'en suis... amnésique, perdue, le corps détruit et pour seul bagage un collier. Durant les jours qui suivent, j'examine le collier sous tous les angles dans l'espoir qu'un souvenir me revienne. Il m'évoque quelque chose de très fort, ce bijou, comme si j'avais profondément chérit la personne qui me l'a offert. À force de l'examiner, je finis par remarquer un léger relief dans le métal et, en plissant les yeux, y lit une inscription. Anya. Ça ressemble à un prénom, ça, non ? À partir de ce moment-là, on me rebaptise Anya et on m'assigne un nom tout ce qu'il y a de plus ordinaire pour combler le manque : Stevenson. Ça sera bien l'affaire.


***


Je suis sortie de l'hôpital après de longs mois de convalescence, promettant au passage à Matthew de ne plus m'attirer d'ennuis et surtout, de venir à chacun de mes rendez-vous. En l'espace de quelques semaines, il est devenu mon seul et unique appui, une ancre solidement figée dans le sol et à laquelle je peux me raccrocher pour ne pas partir à la dérive. J'ai l'impression que je commence à m'attacher à lui... un peu... mais il y a quelque chose en moi qui me pousse à me méfier ou à le tenir loin de moi et j'ignore encore ce que c'est. La logique voudrait que je sois un peu moins ingrate car après tout... il m'a sauvée la vie.

Alors les mois passent, je reprends du poil de la bête, j'apprends à connaître Europolis que j'ai l'impression de découvrir tous les jours, je m'interroge sur ce que je suis... et toutes les semaines, Matthew me bombarde de questions pour essayer de faire ressurgir quelques souvenirs mais rien n'y fait. Contre son avis de médecin un peu trop protecteur, j'ai envie de trouver quelque chose d'utile à faire de mes journées, de bouger, de me défouler pour éviter que mon corps tout entier ne s'engourdisse. Alors je me lance, j'y vais au culot et, contre tout attente, ressors du commissariat de la ville avec un contrat signé. Je me dis alors que c'est la chance, que je suis tombée au bon moment, tout en ignorant qu'en réalité, c'est mon don de persuasion qui a fait tout le boulot.

Et nous voilà en 2050, je dois avoir quelque chose comme 30 ans et grimpe petit à petit les échelons au sein de la brigade criminelle. Dépourvue de mémoire et assez peu sensible aux notions de bien et mal, les dérives violentes de mes coéquipiers ne me dérangent pas. À vrai dire, je me joins à eux la plupart du temps. Est-ce que j'ai tout sauf l'air d'une flic sympa ? Il paraît, mais je ne suis pas là pour faire la circulation ou aider les vieilles à traverser. Je suis là pour arrêter les criminels, que ça se soit en douceur ou avec quelques bleus, d'autant que l'émergence de justiciers en ville ne me dit rien qui vaille. Ils n'obéissent à rien, aucun loi, aucun insigne, rien... jour après jour, je me rends compte que finalement, tout ce que je fais ne sert sûrement à rien.

Alors, lassée de voir que l'on loue ou maudit un super héros mystérieux, je me suis penchée sur une affaire qui n'a pas l'air de passionner grand-monde. Sur mon temps libre, j'épluche des interrogatoires audio, des rapports d'analyse, croise les infos... j'ai même accroché dans mon bureau des photos et des articles de presse, à tel point que j'ai l'air du parfait cliché que l'on trouve dans les films. Après de longs mois de recherche, j'ai enfin quelque chose de concret que je compte bien exploiter : il y a quelqu'un à Europolis qui tire les ficelles d'une organisation qui n'a rien d'un gentil refuge pour chatons. Cette organisation, je compte bien la faire tomber, même si elle doit me mettre face à mes propres démons. Même si je dois faire tomber tous ceux qui ont un jour été comme ma famille. Mais qu'on ne m'en veuille pas, je suis amnésique !

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Ma célébrité

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Jaimie Alexander <span class="Gp_Freak"> •/♦ <a href="/u125"><span class="Gp_Freak">Anastasia Chostakovitch</span></a></span>

Mon métier officiel

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Lieutenant de police <span class="Gp_Freak"> •/♦ <a href="/u125"><span class="Gp_Freak">Anastasia Chostakovitch</span></a></span>

Mon métier officieux

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Tueuse à gages <span class="Gp_Freak"> •/♦ <a href="/u125"><span class="Gp_Freak">Sirin</span></a></span>

Mon Alias

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Sirin <span class="Gp_Freak"> •/♦ <a href="/u125"><span class="Gp_Freak">Anastasia Chostakovitch</span></a></span> (<a href="Ne rien mettre ici. L ajout se fera par les modos du forum">Avis de recherche</a></span>

Mon Groupe

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<a href="/u125"><span class="Gp_Freak">Anastasia Chostakovitch</span></a></span>